Initialement publié le 19 janvier 2018 @ 16h56
Dans le cadre de coupes budgétaires annoncées, l’administration américaine va réduire de façon drastique sa participation financière à l’UNRWA.
L’ambassadrice aux Nations Unies, Nikki Haley, souhaitait la suppression pure et simple des 364 millions de dollars attribués chaque année à l’agence Onusienne, tant qu’elle n’aurait pas mis en œuvre les réformes nécessaires à son bon fonctionnement et à sa transparence, mais le secrétaire d’état aux affaires étrangères, Rex Tillerson, s’est contenté pour l’instant de réduire de moitié la première tranche d’aide, originellement fixée à 125 millions.
Au cœur de cette affaire il y a évidemment la volonté du président Trump d’arrêter de financer toute agence et organisation internationale qui ne contribuerait pas directement aux intérêts américains. Mais il y a également et surtout le virage à 180 degrés de la position des USA dans le conflit Israélo-Arabe depuis que la nouvelle administration s’est engagée à ne pas refaire les mêmes erreurs que les gouvernements précédents.
Mais tout d’abord, qu’est-ce que l’UNRWA ?
Créée en décembre 1949 avec un mandat d’un an, la « United Nation Relief and Work Agency for Palestine Refugees in the Near East » ou « Office de secours et d’aide des Réfugiés palestiniens », avait pour but à sa naissance d’aider à s’établir les quelques 600,000 Arabes de Palestine ayant fui la zone de conflit à la renaissance de l’état d’Israël.
Les causes de cet exil étaient alors de trois ordres selon plusieurs sondages entrepris dans les camps de réfugiés et résumés dans un article de Tibor Mende, paru dans le Monde le 21 avril 1951.
« Certains ne voulaient pas vivre dans un Etat juif, d’autres ont fui la bataille et, une fois celle-ci terminée, n’ont pas pu rentrer chez eux. Beaucoup plus nombreux sont ceux qui sont partis parce qu’on leur avait dit que c’était pour quelques jours, quelques semaines au plus, et qu’ils reviendraient avec les armées arabes triomphantes »
L’ouverture d’une petite parenthèse permet de s’étonner du fait qu’aucun office n’ait été créé en parallèle pour prêter secours aux 870,000 juifs expulsés et spoliés par la majorité des pays Arabo-Musulmans entre 1948 et 1974, y compris ceux chassés militairement de Judée-Samarie par le royaume Hachémite, qui s’empressa de renommer cette région « Cisjordanie » après l’avoir annexée.
Mais il est vrai que leur plus grand nombre fut accueilli par l’état d’Israël et dans le monde occidental tandis qu’à l’exception de la Jordanie, aucun pays arabe limitrophe de l’état hébreu ne fit le moindre geste pour ses propres victimes du conflit, préférant au contraire, pour des raisons politiques, les laisser croupir dans les pires conditions.
En 1950, alors que le général canadien Kennedy, et sir Henry Right, premiers responsables de l’UNRWA devaient constater que leur travail était rendu impossible par la politisation de la crise humanitaire dont ils avaient la charge, et que leur mandat ne pourrait s’achever en un si court laps de temps, un parlementaire anglais travailliste, Richard Crossrian, fut appelé à expliquer leur échec devant la Chambre des Communes.
Sa réponse fut éloquente :
« Tant que nous compterons sur l’ONU pour faire quelque chose de sérieux pour l’établissement des réfugiés, nous ne ferons que nous leurrer, car l’ONU est une organisation politique. Il y a la ligue arabe, et toute la politique de la ligue arabe. La Ligue Arabe a besoin du problème des réfugiés pour maintenir la cohésion contre Israël. L’établissement des réfugiés la priverait de son sujet de plainte le plus important… »
Cette déclaration est sans doute la meilleure explication possible au fait que l’UNRWA, créée pour un an comme nous l’avons écrit plus haut, soit toujours en fonction 70 ans plus tard.
Mais en sept décennies, la petite agence humanitaire est devenue un monstre.
L’UNRWA a aujourd’hui la charge de plus de cinq millions d’âmes, dont seulement quelques 20,000 devraient être considérés comme réfugiés selon la définition internationale des Nations Unies, qui s’applique aux millions d’exilés de par le monde… exception faite des Palestiniens.
« Un réfugié – au sens de la Convention du 28 juillet 1951 – est une personne qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité ou dans lequel elle a sa résidence habituelle, qui craint avec raison d’être persécutée du fait de son appartenance communautaire, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, et qui ne peut ou ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou y retourner en raison de la dite crainte »
Il va sans dire que, selon cette définition, le statut de « réfugié » ne saurait être transmissible de génération en génération, comme c’est les cas pour les Palestiniens car, quiconque aura trouvé refuge dans un pays autre que celui d’origine ne pourra d’avantage continuer d’en bénéficier que ses enfants, petits enfants et arrières petits enfants, nés dans les pays d’accueil.
Un Palestinien possédant un passeport européen, américain ou jordanien n’a donc aucune raison d’être considéré comme réfugié. Sauf pour l’UNRWA.
Que l’on compare alors quelques chiffres de la plus haute importance.
- Tous les réfugiés de la planète ( à l’exception des Palestiniens ) sont pris en charge par le Haut Conseil aux Réfugiés des Nations Unies ( UNHCR ). Un staff de 10,966 cadres et employés tente d’apporter secours à 65,6 millions de victimes, depuis le Congo jusqu’à Myanmar.
- L’UNRWA quant à elle déploie 30,627 exécutifs et 21,571 chargés d’éducation pour s’occuper des descendants de « réfugiés » palestiniens, dont le nombre quoiqu’en inflation de par la nature perverse du système, reste de dix fois inférieur à celui de tous les autres déplacés.
Autrement dit, même en acceptant l’absurde définition du terme « réfugié » attribuée non seulement aux exilés de 1948 mais également à leurs descendants, chaque bénéficiaire reçoit une aide en assistance humaine et en argent environ 50 fois supérieure à celle d’un Africain ou d’un Asiatique directement victime de persécutions !
Le budget annuel de l’UNRWA avoisine le milliard de dollars. Dont, nous l’avons vu, plus d’un tiers est financé par les USA. Mais il y a plus. Contrairement aux autres agences humanitaires onusiennes, celle en charge des descendants de réfugiés palestiniens, dispose d’un fond de pension et de retraite placé en bourse dans divers pays pour un montant de plus d’un milliard et demi de dollars.
Ces chiffres astronomiques ne font que souligner et compléter plusieurs aberrations de l’UNRWA.
Tout d’abord, et non des moindres, selon l’UNRWA “un réfugié de Palestine est une personne dont le lieu de résidence habituelle était la Palestine entre juin 1946 et mai 1948 et qui a perdu à la fois son domicile et ses moyens de subsistance en raison du conflit israélo-arabe de 1948. »
Clairement, tout travailleur immigré ou visiteur, quelle que soit son origine, pouvait entrer dans les statistiques de l’UNRWA et transmettre ce droit, dès lors qu’il pouvait justifier avoir passé ces deux dernières années à l’intérieur de ce qui était devenu Israël.
Interrogé sur ce sujet par l’auteur de cet article, le biographe d’Arafat et ancien conseiller de Saddam Hussein, Saïd Aburish, lui-même réfugié de la région du nord d’Israël, a révélé d’autres aberrations du même ordre.
« Dès lors que l’ONU les a pris en charge, les Palestiniens se sont mis à enterrer leurs morts la nuit, sans les déclarer, afin de se partager leurs rations. Ce qui fait que pendant près de 20 ans, le taux de mortalité officiel dans les camps était proche de zéro. De plus, il y avait beaucoup de mouvements entre les camps. Mais ces déplacements étaient rarement répertoriés, de sorte qu’un Palestinien pouvait apparaître dans plusieurs camps au même moment, multipliant ainsi les aides financières auxquelles il avait droit. »
Mais dès qu’il s’agit de l’UNRWA, les termes employés pour décrire leur mission perdent rapidement leur sens. Par exemple, les banlieues de Djénine et de Ramallah, composées de petites maisons cossues, avoisinant quelques résidences surpeuplées, continuent d’être appelées « camps de réfugiés » alors que les tentes et les réchauds ont depuis longtemps été remplacés par des constructions en dur, le tout à l’égout et l’électricité.
Cependant, pour citer l’ancien ministre et professeur d’histoire Shlomo Ben Ami, que j’interviewai voici quelques années « Les administrations, pour survivre, ont tendance à perpétuer le problème qu’elles sont censées résoudre ».
Le mot est jeté. « Perpétuer le problème ». Mais est-ce pour des raisons financières ou à cause d’intérêts égoïstes que l’UNRWA a tant grossi sans pour autant avoir résolu le moindre problème en sept décennies ?
Dans les années soixante, l’administration israélienne avait développé un projet humanitaire destiné à l’auto-réhabilitation des réfugiés de Gaza. L’idée était simple : il s’agissait de construire des quartiers résidentiels modernes dans les terrains encore inexploités de l’enclave. Les 160,000 Palestiniens vivant alors dans des camps auraient obtenu des prêts gratuits, leur permettant d’accéder rapidement à la propriété, tandis que nombre d’entre eux auraient participé à la construction des unités, des infrastructures, des écoles et des hôpitaux, en échange d’un salaire qu’il leur permettrait de rembourser le prêt. La réaction ne se fit pas attendre. Yasser Arafat en appela immédiatement à la ligue arabe qui fit aussitôt pression sur les Nations Unies, entrainant l’organisation à condamner Israël une fois de plus pour son initiative, et concluant sa résolution par l’injonction suivante « Renvoyez les réfugiés dans les camps ! »
Le projet fut avorté après que seulement 7500 palestiniens aient pu en profiter.
Cet « incident » renvoie au reportage de Tibor Mende dans Le Monde qui, ayant découvert sur le terrain que toute initiative visant à intégrer ou réhabiliter les réfugiés palestiniens du Liban – où, aujourd’hui ces derniers n’ont toujours aucun droit, aucun accès au marché du travail, ni aux soins les plus élémentaires – était interdite, concluait « ces exemples viennent à l’appui de la thèse généralement répandue selon laquelle les Nations Unies dépenseraient de grosses sommes d’argent pour créer un problème de réfugiés plutôt que pour le résoudre »
Une phrase reprise quasiment dans son intégralité par le Premier Ministre Benjamin Netanyahu, en réponse à des questions posées par des reporters concernant la décision américaine de couper les fonds de l’UNRWA.
Les partisans de l’Agence, tel le porte parole des Nations Unies Stéphane Dujarric ont cependant raison de dire que, d’une certaine manière « l’UNRWA est une présence stabilisante sur le terrain ». Car, si demain les plus de 30.000 employés de l’UNRWA, à 95% palestiniens, se retrouvaient sans travail, tandis que les rations, aides, et accès à l’éducation pour les personnes à charge étaient supprimées, la situation déjà explosive dans les « camps » pourrait tourner au drame, et déclencher des vagues de violence sans précédent.
Cependant demeure un grave problème. L’UNRWA n’est pas une simple agence humanitaire. Sa prise de position politique est évidente à tous les niveaux de l’organisation. Un rapport de l’Institut de Suivi de la Paix et de la Tolérance Culturelle dans l’éducation scolaire, affirme que le programme 2016 – 2017 pour les écoles élémentaires de l’AP, en partie financé par l’UNRWA « apprend aux élèves à être des martyrs, diabolise et nie l’existence d’Israël, et se concentre sur un ‘retour’ à un pays exclusivement palestinien. »
Le 12 février 2017, l’ONG « UN WATCH » a dénoncé auprès du secrétaire générale des Nations Unies Antonio Gutteres, la prise de position d’une quarantaine de responsables de l’UNRWA dont les pages Facebook font l’apologie du nazisme, vénèrent Hitler, appellent à l’extermination des Juifs, célèbrent le meurtre et l’enlèvement d’Israéliens, publient la propagande du Hamas à la gloire des « martyrs » et, plus généralement, refusent le droit à l’existence d’Israël, quelles que soient ses frontières. Mis le dos au mur par ces révélations accablantes le porte parole de l’UNRWA, Chris Gunness, qui n’est pas à un dérapage près, s’est empressé de demander qu’une enquête soit ouverte… contre UN WATCH.
Par ailleurs, même les plus modérés parmi les cadres de l’UNRWA, continuent de promouvoir le mythe d’un « droit au retour » qui ne pourra jamais être appliqué car il signifierait la fin de la démocratie israélienne, empêchant de la sorte toute velléité d’intégration ou de réhabilitation.
Pendant les guerres opposant Israël aux organisations terroristes qui dirigent Gaza, des roquettes étaient couramment tirées depuis les écoles de l’UNRWA, ou a proximité de ses hôpitaux. Les accès à plusieurs tunnels ont été creusés sous ses infrastructures. Des munitions ont été retrouvées dans un collège. Evidemment, interrogés sur ce point, les responsables de l’UNRWA se sont empressés de condamner l’intolérable utilisation de leur neutralité à des fins guerrières. Ce qui n’a pas empêché l’UNRWA de rendre au Hamas les roquettes et autres mortiers trouvés dans ses infrastructures…
Plusieurs reportages vidéo conduits par le Center For Near East Policy auprès d’élèves d’écoles de l’UNRWA sont encore plus inquiétants. Aucun enfant, interrogé sur ce point, ne reconnaît le droit à l’existence d’Israël. Tous, filles comme garçons, rêvent de devenir un jour des martyrs à la cause palestinienne, certains affirment sans honte que leur plus grand souhait est de tuer des Juifs. Interrogés sur la source de leur motivation, la plupart répondent que leurs enseignants leur ont appris l’histoire de leur pays « volé par les Juifs ».
Alors, que faire face à une telle situation ?
Une première solution logique serait de fusionner l’UNRWA avec le Haut Commissariat aux Réfugiés, mettant ainsi fin à l’exception palestinienne, tout en étalant les budgets de façon plus équitable entre les vrais réfugiés souffrant les pires misères sur cette planète.
Malheureusement, l’UNRWA dépend de l’Assemblée Générale des Nations Unies, où la majorité automatique anti-Israélienne conduite par la ligue arabe empêche toute modification de son statut actuel.
Le retrait progressif des fonds alloués par les USA semble une mesure positive à condition toutefois que la pénurie en résultant conduise l’UNRWA à réformer sa structure et son mode de fonctionnement. Le danger serait que des pays voyous prennent le relai.
Il s’agirait alors pour l’avatar onusien de faire preuve de transparence, de s’assurer qu’aucun membre d’aucune organisation terroriste ne fasse plus désormais partie de ses employés, de changer son curriculum scolaire douteux pour une éducation engageant à la paix, de dénoncer l’entrainement paramilitaire qui se déroule parfois dans la cour de ses écoles et, en gage de bonne foi, de commencer par annuler la tournée mondiale de son « jeune ambassadeur », Muhammad Assaf, qui, lors des ses interventions ne fait qu’encourager à l’insurrection et à la violence.
Mais un tel article ne saurait conclure sans une citation du porte parole de l’UNRWA, Chris Gunness : « L’UNRWA continuera de travailler inlassablement pour s’assurer de l’application intégrale de notre mandat, tel que défini par l’assemblée générale »
Autrement dit, dans trente ans, si rien n’est fait, l’UNRWA gérera le destin de quarante millions de réfugiés palestiniens.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Pierre Rehov. Publié avec l’aimable autorisation du Figaro Vox.