Le Liban tente de s’approprier un champ gazier israélien en Méditerranée

Le Liban, toujours formellement en guerre avec l’Etat hébreu depuis 1948, essaierait de contourner le droit international maritime et de mettre la main sous un gisement gazier offshore la majorité étant sous juridiction israélienne.

Gilad Erdan, ambassadeur d’Israël à l’ONU, a contesté la semaine dernière auprès de l’ONU l’appel d’offres international lancé par le Liban pour l’attribution des licences d’exploration et d’exploitation des réserves supposées d’hydrocarbures offshore situés dans la zone économique exclusive (ZEE) israélienne.

Dans sa lettre officielle à l’ONU, Erdan a appelé le gouvernement libanais à « retirer cet appel d’offres et à s’abstenir de toute activité susceptible de promouvoir des activités non consensuelles dans les zones maritimes israéliennes ».

Il a expliqué « qu’Israël s’oppose à toute activité économique non autorisée effectuée par le Liban dans ce domaine, y compris, entre autres, l’octroi de droits par le Liban à toute tierce partie, les activités exploratoires, le forage ou l’exploration des ressources naturelles dans les zones maritimes où Israël revendique des droits souverains ». Il a noté qu’Israël avait appelé « les tierces parties concernées à respecter la position de son pays et à s’abstenir de participer, de promouvoir ou de faciliter toute action susceptible de compromettre ses droits ».

Walid Fayad, ministre libanais de l’Énergie, avait annoncé fin novembre 2021 la signature d’une décision réinitialisant le second round de l’appel d’offres pour l’attribution de ces licences. Il avait aussi fait passer le nombre de blocs à attribuer de 5 à 8 – parmi ces blocs, deux sont situés en partie dans la zone contestée entre le Liban et Israël.

Amorcés en octobre 2020, ces pourparlers organisés sous les auspices des États-Unis sont au point mort depuis mai 2021, en raison de divergences sur la surface de la zone contestée entre les deux pays, toujours techniquement en guerre.

À l’issue du dernier round de négociations en mai, les États-Unis ont insisté sur la zone litigieuse initiale tandis qu’Israël a accusé le Liban de vouloir torpiller le processus.

Le Liban ne reconnait pas le droit international

Le conflit concerne une zone contestée de 860 km2, selon une carte enregistrée auprès de l’ONU par le Liban en 2011, jugée aujourd’hui erronée par Beyrouth.

Ainsi, le Liban réclame désormais une zone supplémentaire de 1430 km2, englobant une partie du champ gazier de Karish, déjà confié par Israël à une société grecque. Le Liban réclame aussi la souveraineté sur une part du gisement du Léviathan (1).

Les gisements en eux-mêmes sont inclus dans la Zone Economique Exclusive (ZEE) israélienne (zones définies à la convention de Montego Bay sur le droit de la mer en 1982, délimitant un espace de 200 miles marins – environ 370 km – à partir des côtés de l’Etat en question).

Cependant, le Liban conteste le principe de la ZEE, pourtant fruit du droit international. Selon lui, la frontière entre les deux ZEE n’a pas de fondement légal et ne résulte d’aucun accord entre les deux Etats. Le Liban considère ainsi que les champs gaziers de Tamar et du Léviathan sont issus d’une poche de gaz située dans le sous-sol du territoire maritime libanais.

Introduite dans le nouveau droit de la mer comme une revendication des pays en voie de développement, la zone économique exclusive est n’est pas acceptée par le Liban.

La Convention de 1982 exige que la délimitation de la zone économique exclusive entre États limitrophes se faite à partir de la délimitation des plateaux continentaux, autrement dit le prolongement de la masse terrestre d’un état côtier. Or le Liban  refuse de coopérer avec la commission des limites du plateau continental des Nations Unies.

Le Liban, qui est sous la prise du Hezbollah, considère la ZEE comme un enjeu de possession de la mer et d’appropriation des territoires marins, liés justement aux énergies en mer et aux projets d’exploitation de ces mêmes énergies.

Le Liban veut défier Israël et l’exploitation illégale des ressources

Le Liban a signé en 2018 son premier contrat de prospection avec un consortium international formé par le groupe français Total, l’italien ENI et le russe Novatek.  Celui-ci est crucial pour le pays littéralement en faillite : il faciliterait la prospection d’hydrocarbures en Méditerranée, au moment où les autorités misent sur de potentielles réserves d’hydrocarbures pour enrayer une crise économique, qualifiée par la Banque mondiale comme l’une des pires au monde depuis 1850.

Si Beyrouth ne retirera  pas son appel d’offres, avant de résoudre ce différend  sur la délimitation de ses frontières maritimes, cela est susceptible de créer des troubles en Méditerranée. C’est l’Etat hébreu qui possède les droits sur la zone du gisement. Israël n’hésitera pas à employer la force pour protéger ses droits sur ses ressources.  A l’été 2012,  Jérusalem avait validé la création d’un plan de défense pour protéger les champs.

Le chef du groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a mis en garde Israël en octobre 2021 contre des prospections unilatérales de gaz naturel dans cette zone maritime contestée avant toute conclusion d’un accord entre le Liban et l’État juif.

Israël et le Liban n’entretiennent aucune relation diplomatique et les deux pays sont techniquement en guerre. Ils revendiquent chacun un secteur de la mer Méditerranée, prétendant que celui-ci, selon eux, se situe dans leur zone économique respective.

Il faut remarquer que le pétrole et le gaz ne sont pas des ressources inépuisables. Or, alors que la plupart des pays réfléchissent à présent sur l’après-hydrocarbure et les énergies de substitution, Israël et le Liban semblent vouloir tout miser sur leurs ressources non renouvelables (2).

© Souhail Ftouh pour Israël 24/7

(1) En 2010, Israël a découvert le plus grand gisement gazier offshore de ces dix dernières années, à 135 km au large d’Haïfa. Le gisement du Léviathan, du nom du monstre à sept têtes mentionné dans l’Ancien Testament, recèle une quantité de gaz estimée à 16 trillions de barils, soit 450 milliards de m³, ce qui est assez pour subvenir aux besoins des 100 ans à venir pour Israël.

(2)  L’exportation du gaz sera une source de revenus importante pour Israël, mais aussi un moyen stratégique pour imposer ses vues politiques. Du côté des importateurs, le gaz israélien sera une opportunité de diversifier leurs sources d’approvisionnement et de ne pas dépendre d’un nombre restreint de fournisseurs. Les deux grands marchés potentiels pour le gaz israélien sont l’Europe et l’Asie. Les prix du gaz  sont plus élevés en Europe.

Quitter la version mobile