Malgré la crise économique et la situation de guerre civile du Liban et le fait qu’il est peu probable que le Hezbollah lance une guerre dans une situation aussi grave, les analystes israéliens de la Défense préviennent qu’une guerre est toujours possible.
Israël a effectué un exercice de commandement du front intérieur le 3 novembre afin de tester son état de préparation à une guerre totale avec le Hezbollah.
Le scénario
- Sur la base des évaluations des capacités du Hezbollah par les services de renseignement, des centaines ou des milliers de roquettes et missiles pourraient être tirées sur Israël par le Hezbollah en quelques jours ou semaines.
- La plupart seraient de courte portée, mais certaines pourraient atteindre n’importe quel endroit en Israël.
- Simultanément, des tirs de roquettes pourraient commencer depuis la bande de Gaza et peut-être même depuis la Syrie,
- les combattants d’élite du Hezbollah pourraient tenter d’infiltrer les communautés israéliennes et les avant-postes de l’armée et des émeutes pourraient éclater en Cisjordanie.
La probabilité d’une guerre totale de ce type est faible, mais pas nulle. Et les juifs ont appris dans l’histoire que lorsqu’ils sont menacés, ils doivent prendre la menace au sérieux, et ne peuvent jamais compter sur la communauté internationale et ses belles paroles humanistes, leur soutien le cœur sur la main.
Le Liban traverse actuellement une autre de ses « crises les plus graves de son histoire », ce qui réduit considérablement les chances que le Hezbollah engage le combat, sauf s’il décide qu’il a besoin de mobiliser la société autour d’un « ennemi » commun. D’un autre côté, nous savons par expérience que le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, pourrait changer d’avis à tout moment et déclencher une guerre juste pour unir ses rangs au Liban contre un ennemi extérieur.
Il est également possible qu’une guerre entre Israël et le Hezbollah éclate, non pas en raison d’une décision consciente de l’une des parties, mais à la suite de la multiplication des provocations terroristes qui deviendraient incontrôlables et obligeraient à une escalade. On peut supposer que l’Iran ait également besoin d’une attaque pour solidifier son pouvoir dans le monde musulman. Plusieurs événements de ce type ont eu lieu ces dernières années, qui auraient pu se transformer en affrontements de grande ampleur, mais qui ont été évités par le talent géopolitique du Premier ministre Netanyahou et sa capacité de dissuasion.
Il est clair, cependant, que malgré le calme relatif qui règne aux frontières, le Hezbollah et Israël se sont armés au cours des 15 dernières années.
Plus le temps passe, plus les chances augmentent d’une escalade. Elle pourrait être brève cependant. Il est très difficile d’anticiper la dynamique qui serait créée, et les parties pourraient se retrouver dans une guerre non planifiée et généralisée semblable aux combats de 2006. Naftali Bennet n’a pas d’expérience décisionnelle en politique étrangère et pourrait être poussé à la faute fatale.
- Aujourd’hui, on estime que le Hezbollah dispose d’environ 70 000 roquettes, dont la plupart ont une portée de 45 kilomètres à partir de la frontière libanaise.
- Certaines sont capables d’atteindre presque tout Israël.
- Le Hezbollah possède également des milliers d’autres missiles de courte portée mais suffisamment lourds pour causer des dommages importants aux communautés israéliennes proches de la frontière.
- Il possède également des dizaines de missiles de précision qui inquiètent les services de Sécurité israéliens car ils pourraient frapper des sites stratégiques tels que des centrales électriques, des réseaux électriques, des plates-formes gazières et même les batteries du Dôme de fer déployées dans tout Israël.
- On estime que le Hezbollah tirerait plus de 1 500 roquettes par jour en combattant Israël, dont certaines en salves lourdes sur des zones spécifiques pour défier les défenses aériennes d’Israël.
Dans de telles circonstances, les systèmes de défense d’Israël – y compris le Dôme de fer – ne seraient pas en mesure d’atteindre les impressionnants taux d’interception de 90 % des conflits passés avec Gaza.
En fait, Israël devrait probablement utiliser les intercepteurs avec parcimonie, en donnant la priorité à certaines régions et à certains sites stratégiques tels que les centrales électriques et les bases aériennes. Priorité au matériel par rapport aux citoyens pour sauver plus de citoyens ? Le spectre d’un tel scénario donne la chair de poule.
La semaine dernière donc, Israël a mis en pratique des tactiques de défense passive dans le cadre d’un exercice Home Front :
- les civils se sont exercés à pénétrer dans des espaces sécurisés dans un délai d’alerte de 15 secondes à une minute et demie, en fonction de la distance par rapport à la frontière.
- Le problème est qu’environ 30 % des citoyens israéliens ne disposent pas d’un abri anti-missile tel qu’un abri souterrain ou un espace sécurisé dans leur appartement, renforcé par du ciment armé, ce qui signifie que malgré les exercices grandioses qui ont eu lieu cette semaine, le front intérieur d’Israël est cruellement fragile.
Israël se prépare également à d’autres menaces graves telles que les drones et les missiles antichars et antiaériens avancés qui pourraient menacer la suprématie de l’armée de l’air israélienne.
L’exercice du 3 novembre a également testé l’évacuation des citoyens des communautés proches de la frontière, non seulement en tenant compte des mortiers à courte portée du Hezbollah, mais aussi à la lumière d’autres menaces, notamment les unités Radwan qui s’entraînent à pénétrer en territoire israélien.
- Les unités Radwan compteraient des milliers de combattants qui ont acquis une expérience opérationnelle dans la guerre civile syrienne.
- Dans le plan de Nasrallah intitulé « Conquérir la Galilée », le Hezbollah les charge de se déplacer secrètement en territoire israélien, de prendre le contrôle de positions et de communautés israéliennes et de tuer, blesser et enlever des Israéliens.
- En plus de ces objectifs, ces tactiques visent également à perturber les efforts israéliens pour entrer au Liban et amener les combats en territoire israélien.
Une option pour Israël est d’utiliser ses capacités supérieures d’ingénierie pour rendre difficile le passage des combattants du Hezbollah. Israël a récemment autorisé un budget pour la construction d’une nouvelle clôture de sécurité le long de sa frontière avec le Liban.
Les plans de guerre israéliens publics prévoient :
- des attaques aériennes de grande envergure et
- une pénétration rapide en territoire libanais dans le but de tuer le plus grand nombre possible de combattants du Hezbollah,
- perturber la chaîne de commandement et de contrôle du Hezbollah et
- détruire l’infrastructure du Hezbollah.
- Israël ne visera pas seulement l’organisation terroriste, mais aussi l’État libanais, qui est bien entendu responsable de ce qui se passe sur son territoire.
Il est clair qu’Israël aurait de lourdes pertes dans ces scénarios.
Des citoyens et des soldats israéliens seraient tués et blessés, et des structures et des infrastructures seraient démolies. Cependant, sans sous-estimer le Hezbollah, le rapport de force militaire entre l’organisation terroriste et Israël, avec ses avions de chasse et ses armes de pointe, est clair.
Cela dit, les guerres modernes ne se décident pas uniquement de manière militaire et font intervenir les médias et l’opinion publique, qui est chauffé à blanc contre Israël par les médias du monde entier.
Si le Hezbollah parvient à planter son drapeau dans une communauté israélienne ou à la surprendre d’une autre manière, les terroristes s’attendent que Israéliens soient choqués et démoralisés. C’est probablement leur plus grande erreur d’appréciation.
Jean-Patrick Grumberg