La présidentielle en Israël

Ce n’est pas le vote des français en Israël – binationaux et autres – qui changera l’équilibre des forces en présence dans le combat pour la présidence de la République française.

Il pèse de bien peu de poids face aux près de cinquante millions d’électeurs de la métropole.

Il mérite pourtant qu’on s’y arrête, car il traduit le profond malaise d’un électorat qui se sent orphelin. Il n’y qu’à voir le chiffre des abstentions : en Israël, 90% des personnes jouissant du droit de vote ont préféré ne pas exercer ce droit. Seule une sur dix a donc pris le chemin des urnes. Bien sûr, il y a des causes structurelles. L’identité du locataire de l’Elysée n’intéresse pas une partie de ceux qui ont acquis la nationalité française par filiation plus ou moins lointaine, et ne ressentent aucun lien avec la patrie de leurs ancêtres. Mais cela n’explique pas l’ampleur du phénomène cette année.

Il faut peut-être en chercher la raison dans le désarroi de tous ceux qui ne comprennent pas la politique de la France à l’égard d’Israël. Les choses ont bien changé, depuis ce fameux « Israël, notre ami, notre allié », prononcé il y a soixante ans par le général de Gaulle. Aujourd’hui Israël est le plus souvent montré du doigt. La critique est légitime ; elle est parfois justifiée. Ce qui ne l’est pas, c’est le ton, et encore moins ce qui ressemble à un parti pris délibéré.

En se faisant le champion de la cause palestinienne au point de ne pas en condamner les exactions, et de se refuser à saluer les Accords d’Abraham au motif qu’ils y porteraient atteinte, le Quai d’Orsay a choisi son camp, allant jusqu’à se faire l’écho de scandaleuses accusations d’apartheid.

D’où le désarroi des français d’Israël à la veille du premier tour des présidentielles.

Alors que les sondages en France présentaient les images concordantes d’un duel entre Emmanuel Macron et la chef de file du Renouveau National Marine Le Pen, ils devaient faire un choix douloureux. Reconduire le président sortant, alors que rien n’indique qu’il va infléchir sa politique, porter leurs voix à l’héritière de Jean-Marie Le Pen – ou tout simplement rester chez eux.

La moitié de ceux qui se sont décidés à aller voter ont choisi une solution originale : mettre le bulletin Zemmour dans l’urne. Ils savaient pourtant que l’establishment juif en France avait appelé à ne pas le faire ; que le candidat avait été accusé sinon de tous les péchés d’Israël au moins d’avoir pris des positions équivoques que certains qualifiaient d’antisémites.

Certes, on lui reconnaissait le fait d’avoir mis la question de l’immigration sur la table, mais cette reconnaissance du bout des lèvres ne valait pas acceptation. Comment expliquer alors le soutien exprimé par ce bulletin ? Tout simplement comme un vote de défiance et rien de plus.

Au second tour, s’agissant de choisir celui ou celle qui représentera la France pour les cinq prochaines années, on peut affirmer sans risque que c’est le bulletin Macron qui l’emportera. 

© Michèle Mazel pour Israël 24 7.org

Michèle Mazel est diplômée de Sciences-Po et licenciée en Droit, et a été boursière Fullbright en science politique. Pendant plus de trente ans, elle a accompagné de par le monde son mari, le diplomate Zvi Mazel, qui fut notamment ambassadeur d’Israël en Egypte, en Roumanie et en Suède. Elle en a tiré la matière de nombreux ouvrages – thrillers et romans. Elle contribue régulièrement à plusieurs organes de presse.

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