Deux affaires majeures de corruption ont éclaté en même temps, et elles font transpirer les élites israéliennes impliquées – qu’on peut imaginer en ce moment en train de faire fonctionner leurs broyeurs de documents et d’effacer le contenu de leurs téléphones.
(1) un vaste coup de filet anticorruption contre le syndicat Histadrout ; (2) le scandale dit Sdé Teiman — fuite d’une vidéo montrant des abus, suivi de la démission/aveu puis arrestation et enquête sur la procureure militaire Yifat Tomer-Yerushalmi.
Elles reposent sur deux préceptes :
- Je fais partie des élites et des privilégiés. Je suis en droit de faire ce que je fais, car Netanyahou a trop de pouvoirs, la droite entraîne le pays dans une direction qui ne me plait pas, d’ailleurs l’armée maltraite les « pauvres victimes palestiniennes ». Ce que j’ai fait est donc moralement justifié pour révéler au monde leurs exactions, et la fin justifie les moyens.
- Je fais partie de l’élite. Je suis protégé, je ne risque rien, je suis au-dessus des lois, et je mérite les bénéfices que j’en tire, car je suis moralement supérieur.
1 Scandale à la Histadrout. L’affaire la plus récente n’est pas celle qui attire le plus grand nombre de commentaires, médiatiques et sur les réseaux sociaux, et pourtant, elle est la plus significative parce qu’elle met en cause une institution syndicale extrêmement puissante, la Histadrout (elle est si puissante qu’elle a été capable de fermer totalement – et illégalement – l’aéroport international Ben Gourion pendant une journée entière, lors du chantage de la gauche contre la réforme judiciaire en 2013), et d’en sortir sans la moindre réprimande ni poursuite pénale.
Et là voilà au cœur d’une affaire de corruption majeure.
- Corruption et favoritisme : L’enquête, menée sur une période de deux ans en sous-marin, cible des soupçons de pots-de-vin, de fraude et de népotisme. Plus de 350 suspects, dont des responsables syndicaux et des hommes politiques, sont impliqués et ont été soit arrêtés soit seront entendus par la police dans les jours et les semaines qui viennent.
- Les accusations portent notamment sur des allocations de postes et des avantages illégaux au sein de la Histadrout, particulièrement dans le juteux secteur de la construction.
- Arrestations majeures : Parmi les personnes arrêtées figurent Arnon Bar-David, le président de la Histadrut, sa femme, ainsi que plusieurs figures de haut rang au sein de l’organisation et plusieurs grands hommes d’affaires. Deux maires sont également impliqués, bien que leurs identités n’aient pas été précisées dans les données immédiates.
- Étendue géographique : Les perquisitions ont eu lieu dans 55 localités à travers le pays, incluant des domiciles des suspects et des bureaux municipaux dans 12 autorités gouvernementales, six autorités locales et cinq sociétés, ce qui indique une opération coordonnée à l’échelle nationale.
- Parmi les personnes interrogées figurent des élus municipaux de grandes villes comme Rishon Lezion et Ashdod ainsi que de petites localités telles que Harish et Rosh Ha’ayin.
1) Pots-de-vin, fraude et népotisme
D’après les informations disponibles au moment d’écrire ces lignes, le mécanisme de corruption présumé au sein de la Histadrut (j’écris « présumé » : au risque de faire vieux jeu, je crois que la présomption d’innocence – innocent jusqu’à ce qu’on soit prouvé coupable – fait encore partie des droits de l’homme, des droits fondamentaux), notamment dans son secteur de la construction, repose sur un système sophistiqué d’échanges de faveurs et de détournements d’intérêts.
Voici les éléments clés :
- Échange de postes et contrats : Le mécanisme impliquait l’attribution de postes de directeurs dans des entreprises ou corporations liées à la Histadrut (comme des sociétés municipales ou des entreprises publiques) en échange de faveurs. Ces nominations étaient souvent accordées à des alliés ou des proches des responsables syndicaux, illustrant un népotisme puant.
- Portefeuilles d’assurance : Un aspect central du système était le transfert de portefeuilles d’assurance des travailleurs (gérés par la Histadrut) vers des compagnies privées, notamment celle d’un homme d’affaires influent dans le secteur de l’assurance. En retour, cet homme d’affaires aurait fourni des pots-de-vin sous forme de commissions, paiements ou avantages divers.
- Pots-de-vin et avantages illégaux : Les pots-de-vin incluaient des voyages de luxe à l’étranger, des réservations dans des restaurants coûteux, des bonus financiers et même des cadeaux comme du champagne (tiens, on parle beaucoup, dans les médias, du champagne offert à Netanyahou, très peu de celui-là). Ces avantages étaient offerts à des responsables syndicaux, des maires et d’autres figures publiques pour garantir leur coopération et leur silence.
- Blanchiment d’argent et fraude : L’argent généré par ces contrats d’assurance lucratifs était présumément blanchi à travers diverses transactions, permettant aux principaux bénéficiaires de dissimuler l’origine illégale des fonds. La fraude portait également sur la manipulation des appels d’offres et des procédures internes pour favoriser les entreprises impliquées.
- Impact sur les travailleurs et services publics : Ce système a été accusé d’avoir nui aux travailleurs, en détournant des ressources qui auraient dû servir à améliorer leurs conditions, ainsi qu’aux services publics, en compromettant l’efficacité des institutions concernées.
- Ce mécanisme, surnommé l’« affaire Main dans la Main » (Hand in Hand), a été mis au jour après une enquête de deux ans menée par l’unité anti-fraude Lahav 433 de la police israélienne, culminant avec les arrestations du 3 novembre 2025.
2) Le président de la compagnie d’assurance impliqué
Un homme d’affaire et cadre supérieur d’une grande compagnie d’assurance, très proche du président de la Histadrut Arnon Bar‑David, aurait fait nommer des personnes à la tête de comités de travailleurs et veillé à leur placement dans des conseils d’administration d’organismes publics comme El Al, Israël Railways et Keren Kayemeth LeIsrael (Fonds national juif). En retour, il aurait obtenu des contrats d’assurance municipaux valant des millions de shekels. Le dirigeant visé serait Ezra Gabai, de Gabai Insurances, selon certaines sources, et son fils Assaf Gabai. Il ont été arrêtés.
Selon les déclarations de la police relayées par la presse, Gabai est suspecté d’avoir utilisé ses relations avec Bar-David pour obtenir des mandats, des nominations et convertir des portefeuilles d’assurance (travailleurs / institutions) au profit de sa structure. On parle explicitement d’un mécanisme de « donnant-donnant » et d’avantages offerts en contrepartie (toutes des allégations au stade de l’enquête).
Assaf, le fils d’Ezra et cadre dans la même agence, a été également arrêté et sa garde à vue a été prolongée. Le tribunal a souligné un risque de subornation/altération des preuves comme motif d’extension de détention.
Rôle et soupçons :
- Domination de la Histadrut : Selon l’inspecteur Yossi Gazit de Lahav 433 (cité par The Yeshiva World), cet homme d’affaires a traité la Histadrut comme son « domaine personnel ». Il aurait exploité son influence pour détourner des contrats d’assurance à son profit, gagnant des sommes importantes sur chaque travailleur recruté.
- Corruption active : Il est soupçonné d’avoir distribué des pots-de-vin variés (voyages, nominations à des postes prestigieux, cadeaux luxueux) à des responsables syndicaux et politiques pour sécuriser des contrats d’assurance et maintenir son contrôle sur des portefeuilles importants.
- Système de « donnant-donnant » : En échange de ces faveurs, il aurait obtenu des nominations de directeurs dans des corporations publiques et des conseils d’administration, tout en canalisant de gros contrats d’assurance vers sa compagnie. Ce système a permis à son entreprise de prospérer financièrement grâce à des fonds publics détournés.
- Blanchiment et enrichissement : Les enquêtes suggèrent qu’il a participé à des activités de blanchiment d’argent pour dissimuler les profits illégaux générés par ce réseau.
- Arrestation et implications : Cet homme d’affaires a été arrêté lors des raids du 3 novembre 2025, aux côtés d’Arnon Bar-David et de dizaines d’autres suspects. Son implication a amplifié l’ampleur de l’affaire, mettant en lumière les liens entre le pouvoir syndical, les affaires et la politique locale.
3) Ce qui n’est pas (encore) confirmé ou manque de vérification
- Le rôle présumé du fils « Assaf Gabai » est mentionné. Toutefois, des sources indépendantes clarifiant son rôle exact, la nature de son poste dans la compagnie, etc., sont encore limitées.
- Le nom exact de la compagnie d’assurance (« Gabay Insurance ») et les montants (« plusieurs millions de shekels », « dizaines de millions », etc.) évoqués ne sont pas tous confirmés par des documents publics / et la presse fiable. On voit des mentions de « larges sommes », « de réseau de corruption de plusieurs millions de shekels », mais les chiffres précis ou la pleine description structurelle ne sont pas encore disponibles.
- Les affirmations sur les « nominations à des postes de directeurs dans des institutions publiques ou entreprises affiliées », la mécanique exacte des « contrats d’assurance détournés », etc., font partie des allégations de l’enquête.
- L’association politique (activiste du Likud) pour Ezra Gabay est mentionnée par Ynet (« Likud activist »), mais je n’ai trouvé pas une confirmation exhaustive à ce stade.
- La compagnie Gabay / גבאי (GABAY Insurance)) est active depuis des années. La presse rapporte que l’agence est au centre des soupçons parce qu’elle aurait remporté des portefeuilles publics/collectifs et encaissé des commissions liées à des institutions publiques. Les chiffres détaillés et la nature des liens ne sont pas encore publiquement démontrés dans les dossiers consultés.
- Détails internes des mécanismes de blanchiment ou des comptes exacts : les documents saisis mais n’ont pas été rendus publics ; donc la prudence s’impose avant de parler de schémas financiers concrets.
Le commissaire de police Danny Levy a qualifié l’affaire de l’une des plus graves qu’il ait vue et promis des investigations sans peur ni indulgence à l’encontre de hauts responsables. Il y a eu ordres de restriction de publication signalés dans certains comptes-rendus pour des noms liés à l’enquête.
2 L’affaire de Sde Teiman, ou la fuite d’une vidéo accablant des soldats de l’unité 100. L’affaire de Sde Teiman est l’autre scandale majeur en Israël, portant sur des allégations d’abus graves, y compris des violences sexuelles, qui auraient été commis par des soldats de réserve de l’armée israélienne contre des détenus arabes à la base militaire de Sde Teiman, dans le sud du pays. Cette installation, créée en juillet 2023 pour détenir des suspects de terrorisme de Gaza en raison d’une surcharge des prisons, est devenue le symbole d’accusations de torture systématique suite à la fuite d’une vidéo à la presse.
La vidéo, diffusée par Channel 12 le 6 août 2024, montre des réservistes de Tsahal isolant un détenu, un terroriste de Gaza, derrière des boucliers anti-émeute pour le malmener. Elle provient des caméras de sécurité internes de la base et dure environ 1 minute. Elle a été fuitée par le bureau de la procureure militaire Yifat Tomer-Yerushalmi, qui l’a admis le 31 octobre 2025 dans sa lettre de démission, pour « révéler la vérité » pour se venger des accusations de partialité contre les soldats formulées contre elle.
La vidéo a causé un tort majeur à Israël, qui a été, suite à sa diffusion, accusé dans des rapports de l’ONU et d’organisations de droits humains, d’avoir fait subir aux détenus – y compris des enfants (entendre par là des terroristes qui ont entre 15 et 18 ans) – des positions de stress forcées, des privations d’hygiène, de nourriture et des coups.
1) Contexte et Origines. Rôle central de la procureure générale militaire Yifat Tomer-Yerushalmi
- Octobre 2025 : L’enquête sur la fuite de la vidéo reprend. Un test polygraphique (détecteur de mensonges) administré par le Shin Bet à un officier du bureau de la procureure militaire révèle des incohérences. Cet officier, proche de Yifat Tomer-Yerushalmi, avoue avoir transmis la vidéo aux médias. Les résultats sont transmis au nouveau chef du Shin Bet, David Zini, qui les relaie au chef d’état-major de l’IDF, Eyal Zamir, puis à la procureure générale Gali Baharav-Miara, déclenchant une enquête criminelle.
- L’affaire du polygraphe : Le test, initialement routinier pour une promotion, n’était pas lié à Sde Teiman. L’officier interrogé sur la fuite a échoué, avouant sa participation. Cela a exposé une possible dissimulation au sein du bureau de Tomer-Yerushalmi, qui avait nié toute implication interne. Des sources indiquent que des fichiers informatiques partiels contredisent les versions officielles, pointant vers une dissimulation orchestrée via un groupe WhatsApp impliquant 8-10 hauts responsables.
2) L’Histoire de la Vidéo « trafiquée »
Une théorie récurrente affirme que la vidéo de surveillance fuitée en août 2024 a été manipulée ou « trafiquée » pour discréditer l’armée israélienne. Ce narratif est qualifié de « blood libel » (calomnie antisémite historique) par ses partisans, qui y voient une arme politique de l’État profond judiciaire contre les forces armées en temps de guerre. Cependant, les enquêtes officielles et les analyses indépendantes ne confirment pas ces allégations pour le moment, bien que le terme de « viol » n’ait pas été retenu dans l’acte d’accusation.
3) Yifat Tomer-Yerushalmi : Rôle et Implication
Yifat Tomer-Yerushalmi, 51 ans, est une juriste chevronnée nommée avocate générale militaire (Military Advocate General, MAG) en 2021, devenant la deuxième femme à ce poste. Juriste du parquet militaire, considérée comme proche de certains magistrats de gauche, elle est connue pour ses positions « intégristes » sur le droit humanitaire appliqué aux terroristes. Elle supervisait les enquêtes sur les crimes présumés des forces armées. Dans cette affaire, elle est accusée d’avoir approuvé la fuite de la vidéo en août 2024 pour « contrer la propagande anti-enquêteurs » et « révéler la vérité sur les violences ». Cependant, cela a été perçu comme une diffamation contre les soldats, alimentant les accusations de « blood libel » (calomnie antisémite historique).
Éléments de corruption et contradiction sur sa capacité à témoigner :
- Tomer-Yerushalmi a été déclarée « incapable de témoigner » par son bureau, invoquant un état psychologique fragile post-démission. Cependant, la police contredit cela, affirmant qu’elle est apte et que cette déclaration vise à obstruer l’enquête. Des sources policières soulignent des « préoccupations graves d’interférence » et de faux témoignages fournis à la Cour suprême et à l’ex-ministre de la Défense Yoav Gallant, qui l’accuse d’avoir menti sur l’origine de la fuite.
- L’enquête révèle des éléments de corruption : une enquête interne « fictive » menée par son bureau a conclu que la fuite ne provenait pas de ses rangs, malgré des preuves contraires. Des chats WhatsApp montrent une coordination pour couvrir la fuite. Cinq arrestations ont eu lieu (dont Tomer-Yerushalmi et le colonel Matan Solomesh, son ancien procureur en chef, soupçonné de dissimulation), avec sept interrogatoires en cours. Des accusations portent sur fraude, abus de pouvoir, obstruction de justice et violation de confiance.
| Accusations contre Tomer-Yerushalmi | Détails |
|---|---|
| Fuite de matériel classifié | Approbation de la transmission de la vidéo aux médias pour « contre-propagande ». |
| Obstruction de justice | Enquête interne ; fausses déclarations à la Cour suprême. |
| Contradiction sur témoignage | Déclarée « incapable » par son camp, mais police affirme son aptitude ; risque de non-audition pour éviter révélations. |
| Éléments corrompus | Coordination via WhatsApp ; implication possible de la procureure générale Baharav-Miara. |
4) Pourquoi a-t-elle démissionné ?
La Démission de Yifat Tomer-Yerushalmi.
- Le vendredi 31 octobre 2025, elle soumet sa lettre de démission au chef d’état-major de Tsahal, le lieutenant-général Eyal Zamir, lors d’une réunion le matin même. Cette démission est entrée en vigueur immédiatement, et un remplaçant intérimaire (le colonel Erez Deri) a été nommé le jour même pour assurer la continuité du bureau du MAG.
- Contexte immédiat : sa démission survient au milieu de l’enquête criminelle ouverte par la police israélienne suite à la révélation que la fuite de la vidéo de surveillance de Sde Teiman provenait directement de son bureau. Un test polygraphique administré à un officier de son équipe avait révélé des incohérences, menant à une enquête sur une possible « couverture » impliquant plusieurs hauts responsables, dont elle-même.
- Raison principale de sa démission, selon sa lettre : Dans sa lettre de démission, publiée intégralement par Haaretz, Tomer-Yerushalmi assume « l’entière responsabilité » de la fuite. Elle explique avoir autorisé la diffusion de la vidéo aux médias pour :
- Contrer la « propagande mensongère » menée par des « figures d’extrême droite » (comme le ministre Itamar Ben-Gvir et des députés de la coalition de Netanyahu) qui accusaient les enquêteurs militaires de « blood libel » (calomnie antisémite historique) et de partialité contre les soldats.
- Protéger son personnel des attaques et de la délégitimation, dans un climat où les procureurs militaires étaient qualifiés de « traîtres » par des protestataires qui avaient envahi la base de Sde Teiman en juillet 2024.
- Révéler la vérité sur les violences : Elle insiste sur le « devoir d’enquêter » dès qu’il y a suspicion raisonnable d’abus contre un détenu, même si ce dernier est un « terroriste du pire genre » (référence aux suspects de Hamas détenus à Sde Teiman). Elle qualifie la vidéo de preuve « irréfutable » des sévices (coups, déchirure rectale par un objet pointu), justifiant l’ouverture des poursuites contre les cinq réservistes inculpés en février 2025 pour « agressions aggravées et lésions graves ».
- Autres facteurs : La pression politique s’est intensifiée après l’annonce de l’enquête le 29 octobre. Tomer-Yerushalmi était en « congé forcé » depuis le 30 octobre, et elle cite dans sa lettre les « menaces croissantes » contre son bureau depuis le début de la guerre à Gaza en 2023. Des sources internes indiquent qu’elle craignait une perte de confiance dans l’institution judiciaire militaire si elle restait en poste.
Extrait clé de sa lettre (traduit de l’hébreu, publié le 31 octobre 2025) :
« J’ai approuvé la publication de matériel aux médias dans une tentative de contrer la propagande mensongère dirigée contre les autorités d’application de la loi de l’armée, et pour protéger mon personnel d’une campagne de délégitimation. Il est de notre devoir d’enquêter sur toute suspicion raisonnable d’actes de violence contre un détenu, indépendamment de son statut. »
5) A-t-elle démissionné ou a-t-elle été limogée ?
- C’est une démission formelle, mais sous forte pression : Officiellement, il s’agit d’une démission volontaire, acceptée par Eyal Zamir le 31 octobre. Cependant, les faits montrent qu’elle a été poussée à la démission par une série d’événements :
- Le matin du 31 octobre, le ministre de la Défense Israël Katz a publié un communiqué annonçant qu’elle ne reprendrait pas ses fonctions en raison de la « gravité des soupçons » pesant sur elle, et qu’il initierait une procédure de limogeage. Katz a qualifié la fuite de « blood libel contre les soldats de Tsahal » et affirmé qu’elle avait « diffamé l’armée ».
- Selon Haaretz et The Jerusalem Post, la réunion avec Zamir (où elle a remis sa lettre) a eu lieu une heure seulement après l’annonce de Katz, suggérant que la démission était une façon « d’adoucir » un limogeage imminent.
- Tomer-Yerushalmi n’a pas contesté publiquement l’annonce de Katz, mais des soutiens à gauche ont dénoncé une « interférence politique » dans l’indépendance du parquet militaire. Evidemment : c’est le message qu’ils diffusent lorsque ce n’est pas eux qui interfèrent politiquement.
5) David Zini : Le Nouveau Chef du Shin Bet et Son Rôle Pivot
David Zini, major-général de 51 ans (père de 11 enfants, issu d’une famille religieuse d’Ashdod), a été nommé chef du Shin Bet le 5 octobre 2025 par Benjamin Netanyahu, succédant à Ronen Bar dans un contexte de tensions avec le Premier ministre qui a déclaré avoir perdu confiance en lui.
Comme Zini n’est pas un homme appartenant à l’élite de gauche, son mandat de cinq ans, approuvé par le cabinet, a été controversé : la Cour suprême a initialement bloqué la nomination pour « conflit d’intérêts », mais un compromis a été trouvé en juillet 2025.
Il se dit que sans Zini, l’affaire ne serait jamais sortie.
- Implication dans l’affaire : Zini, en poste depuis seulement trois jours lors du test polygraphique (fin octobre 2025, pendant Souccot), a été informé après des fuites internes montrant que le test avait révélé des mensonges du côté du parquet. Zini aurait rouvert le dossier et transmis les résultats à Zamir, déclenchant l’enquête.
- Des analystes comme Amit Segal estiment que « sans Zini, l’affaire n’aurait jamais éclaté » : son prédécesseur, perçu comme aligné sur l’« establishment judiciaire », n’aurait pas agi et aurait enterré l’affaire. Zini incarne un virage vers une ligne plus alignée avec le vote des électeurs – avec la coalition de droite.
6) Les Derniers Rebondissements : La « Disparition » d’Hier (2 novembre 2025)
Le 2 novembre 2025 marque un pic dramatique.
- Avant cela, Tomer-Yerushalmi démissionne le 31 octobre après avoir admis la fuite dans une lettre à Zamir, invoquant le devoir d’enquêter sur les violences contre les détenus.
- Netanyahu la qualifie de « pire catastrophe de la hasbara de l’histoire d’Israël ».
- Le 2 novembre au matin, Tomer-Yerushalmi laisse une note ambiguë à sa famille (« Prenez soin de vous ») et sa voiture et la note ont été retrouvées près de la plage de Hof HaTzouk (Tel Aviv).
- Injoignable, elle est déclarée disparue, déclenchant une opération massive : police, marine, drones, fouilles terrestres et maritimes. Peur de suicide liée aux pressions (probablement pas à la culpabilité).
- Soirée : Elle est localisée vivante et en bonne santé à Herzliya après avoir contacté son mari depuis un téléphone non personnel.
- Elle est escortée pour un examen médical, puis arrêtée pour suspicion de fuite et obstructions.
- Théorie policière : Mise en scène pour détruire des preuves. Elle aurait emporté deux téléphones : un jeté en mer (personnel, contenant des preuves cruciales comme des chats WhatsApp incriminant potentiellement Baharav-Miara) pour induire en erreur ; l’autre utilisé pour être tracée et retrouvée après environ 2 heures.
7) Conséquences judiciaires (3 novembre 2025)
Un tribunal de Tel-Aviv prolonge la détention de Tomer-Yerushalmi et Solomesh jusqu’au 5 novembre, citant les risques d’obstruction. Cinq arrestations au total ; saisie de plusieurs téléphones. Les accusés dans l’affaire d’abus exigent l’annulation des poursuites pour « procès inéquitable » dû à la fuite de la vidéo.
La coalition tente d’écarter Baharav-Miara de l’enquête pour conflit d’intérêts, risquant une crise constitutionnelle.
L’enquête s’élargit, avec des témoignages internes accusant des irrégularités dans la justice militaire depuis deux ans.
Le président Herzog appelle au calme pour éviter les « attaques mutuelles ».
Sur X, les débats font rage : à gauche, on protège, et on salue la fuite de la vidéo comme un acte de lanceur d’alerte, à gauche, on y voit une conspiration judiciaire, un acharnement anti-Netanyahou et une haine contre l’armée.
L’avocat des soldats accusés, Ephraim Demri, met en cause le système judiciaire d’avoir « inventé une affaire » pour humilier Tsahal.
8) Réactions de la gauche / médias de gauche
Sur l’affaire Sde Teiman
- De nombreux médias de gauche et organisations de défense des droits humains ont qualifié la vidéo et les allégations d’abus à Sde Teiman comme un symbole de la dérive de l’armée et du système de justice militaire dans le contexte de la guerre.
- La gauche souligne que les allégations de violences ne sont pas anecdotiques, mais s’inscrivent dans un pattern systémique de mauvais traitements des détenus arabes, y compris enfants, à Sde Teiman.
- Certains journaux de gauche estiment que la fuite de la vidéo — même si juridiquement problématique — a permis de lever un voile sur des pratiques jusque-là occultées. Ainsi, il y a un discours selon lequel la divulgation était un « lanceur d’alerte » ou un acte de transparence.
- Il existe également des mises en garde : même la gauche admet que la manière de communiquer (la fuite) peut compliquer l’enquête, et elle appelle à une procédure judiciaire rigoureuse pour protéger les droits des victimes et des accusés.
- La gauche critique ce qu’elle perçoit comme un fonctionnement opaque et une difficulté à garantir l’impartialité quand l’armée enquête sur elle-même.
- En même temps, la gauche met en garde contre les discours de la droite qui présentent systématiquement toute enquête comme une « attaque contre l’armée », ce qui selon elle affaiblit la crédibilité plutôt que de renforcer la confiance dans l’institution.
- L’affaire est vue comme un test de la crédibilité du système judiciaire militaire : si elle est traitée correctement, cela pourrait renforcer l’État de droit. Sinon, ce pourrait être une démonstration de « l’impunité » pour certains acteurs.
- Elle cristallise, selon la gauche, les divisions dans la société israélienne entre ceux qui veulent privilégier la « sécurité à tout prix » et ceux qui insistent sur l’éthique, la transparence et la responsabilité des institutions.
Sur l’affaire Histadrout (corruption)
- Les médias de gauche affichent un intérêt relativement fort pour cette affaire, la présentant comme un symptôme d’un problème structurel de corruption dans les élites syndicales et politiques.
- La gauche insiste sur le fait que la Histadrout, historiquement un pilier du mouvement ouvrier et de la gauche, ne peut pas être considérée comme à l’abri de scandales, et que ce renversement est révélateur d’un affaiblissement moral de certains axes du pouvoir.
- Elle demande que les enquêtes soient indépendantes, transparentes, et qu’elles conduisent à des sanctions effectives — sinon, cela nourrit un sentiment d’injustice sociale : les classes populaires se sentent spoliées pendant que les élites continuent comme si de rien.
- Le discours de gauche met l’accent sur l’impact sur les travailleurs : « Les ressources qui auraient dû améliorer les conditions des travailleurs ont été détournées » — ce que la gauche valide comme un point central.
- La gauche critique parfois ce qu’elle voit comme une réaction tardive ou symbolique de la part des autorités : les arrestations sont saluées, mais beaucoup se demandent si les têtes vont réellement tomber et si les structures profondes vont changer.
- Elle s’interroge sur l’équité des poursuites : ceux qui sont arrêtés sont-ils majoritairement des « petits maillons » ou bien des décideurs majeurs ? Et est-ce que le système judiciaire traite tous les cas de la même manière ?
- L’affaire est utilisée comme un levier pour appeler à une réforme plus large : non seulement judiciaire, mais aussi syndicale, et de gouvernance publique.
- Elle renforce l’argument selon lequel sans transparence ni responsabilité, les promesses de la gauche-historique (protection des travailleurs, justice sociale) deviennent vides.
- Enfin, elle permet à la gauche de réaffirmer son profil comme force de contrôle démocratique, d’intégrité institutionnelle, face à ce qu’elle perçoit comme un basculement vers des pratiques opaques ou clientélistes.
9) Derniers développements
L’époux de Yerushalmi a été interrogé brièvement par la police sur le téléphone manquant.
La Commission Zini (Shin Bet) a reçu les premiers rapports de cyber-analyse du téléphone retrouvé.
Selon Channel 14 à 19 h 45, une note interne du Shin Bet aurait confirmé des échanges compromettants entre Yerushalmi et un conseiller juridique du ministère de la Défense – qui n’a pas été nommé.
Le procureur militaire en chef a suspendu deux officiers impliqués dans la chaîne de décision initiale.
Aucune déclaration officielle du bureau de Baharav-Miara.
Conclusion
L’affaire exacerbe les clivages : la droite contre « l’Etat profond » judiciaire, au milieu du cessez-le-feu fragile à Gaza.
© Jean-Patrick Grumberg pour Israël 24/7.org
