« Israël est une démocratie. En démocratie, la liberté d’expression est à la fois précieuse, importante, et doit être protégée, contrairement à la France qui la bride dans tous les sens. A ce titre, il est important qu’un artiste puisse cracher, diffamer, mentir sur Israël s’il le souhaite, car la liberté d’expression n’est pas faite pour protéger les propos consensuels, mais ceux qui dérangent, qui sont à la limite de l’acceptable. Mais les citoyens Israéliens ne devraient pas être contraints de financer ça, ce n’est pas démocratique mais autoritaire ». – Jean-Patrick Grumberg.
Voilà en résumé ce qu’un élu de droite devrait déclarer. Et c’est ce que vient de faire le ministre israélien de la Culture. Il promet d’arrêter que les Israéliens financent les arts qui diffament Israël. Rien que cette décision, si elle est effectivement mise en place, mérite d’être célébrée et applaudie : c’est une victoire de la démocratie.
Le nouveau ministre de la Culture et des Sports, Miki Zohar, s’est engagé lundi à ne pas financer les œuvres d’art qui « diffament l’État d’Israël dans le pays et dans le monde ».
S’exprimant lors d’une cérémonie de passation de pouvoirs aux côtés de son prédécesseur Chili Tropper, Miki Zohar a déclaré qu’aucun shekel des contribuables ne serait dépensé pour des formes d’art et de culture qui « promeuvent un récit » contre Israël.
« Le monde de la culture et de l’art est un monde qui nous représente en tant que peuple, en tant que nation. Nous refuserons tout financement à ceux qui promeuvent le récit de notre ennemi et portent atteinte à la bonne réputation d’Israël », a-t-il déclaré.
« Les terroristes et les martyrs ne seront pas présentés comme des héros sous notre surveillance. Nous ne ferons pas de compromis sur l’idéologie », a ajouté M. Zohar.
Le ministre, membre du parti Likoud du Premier ministre Benjamin Netanyahou, a déclaré que recevoir ce portefeuille était un « rêve devenu réalité » et a fait remarquer que son fils Eliav est un musicien qui a récemment remporté une émission de télé-réalité musicale populaire.
« J’ai élevé un artiste et j’ai appris comment se comporte l’âme d’un artiste, donc je pense que le monde de la culture aura un ministre avec lequel ils pourront travailler », a déclaré Zohar.
« J’ai d’innombrables projets et j’espère les réaliser tous », a-t-il ajouté. « S’ils réussissent, ils changeront la culture israélienne. Nous ferons tout pour apporter de plus en plus de ressources. Les fonds dont nous disposons actuellement ne sont pas suffisants. Nous devons réduire l’écart par rapport au reste du monde. »
M. Zohar a également fait l’éloge de M. Tropper, déclarant :
« Il ne fait aucun doute que l’on se souviendra de vous comme d’un excellent ministre de la Culture. »
Dans ses remarques, M. Tropper a mis en garde son successeur contre le risque de raviver d’anciennes querelles sur la culture, dans un clin d’œil apparent à son propre prédécesseur, Miri Regev du Likoud.
« Nous avons prouvé qu’une manière respectueuse est non seulement plus appropriée à mon avis, mais aussi plus efficace. Une culture du mensonge et de la haine n’a pas de raison d’être », a déclaré Tropper.
« Ne soyez pas pressés de vous quereller – il y a eu des années de querelles et de bagarres. Ne vous précipitez pas pour revenir à cela », a-t-il poursuivi. « Le ministre a beaucoup de pouvoir, et depuis cette position de pouvoir, vous pouvez multiplier le bien et vous pouvez créer le mal. Vous pouvez corrompre avec le pouvoir et vous pouvez arranger les choses avec sa protection. »
L’été dernier, justifiant son refus d’intervenir dans la représentation d’une pièce de théâtre sur les violations des droits des Arabes en Judée, basée sur des témoignages de soldats des Forces de défense israéliennes, Tropper avait déclaré : « Il ne me semble pas que vous voudriez vivre dans un pays où le ministre de la Culture s’immisce dans certaines pièces. Aujourd’hui c’est moi, demain quelqu’un d’autre avec des opinions différentes s’assiéra à ma place », avait déclaré Tropper.
Regev, pourtant, n’a pas hésité à intervenir dans de telles affaires, se faisant la championne d’une loi dite de loyauté culturelle qui lui aurait permis de retenir le financement public des organisations culturelles « qui travaillent contre les principes de l’État. »
Plus de démocratie, de respect de la règle de droit et d’égalité
- Lundi également, le nouveau ministre des Communications, Shlomo Karhi, a déclaré qu’il ferait avancer les plans visant à « conduire le marché des communications vers un marché libre et compétitif ».
Karhi, un législateur du Likoud, s’est prononcé le mois dernier en faveur de la fermeture des services d’information du radiodiffuseur public Kan et de la radio de l’armée, qui font une concurrence déloyale, et ne devraient pas être financés de force par des Israéliens de droite pour diffuser leurs messages de gauche. Si encore ils étaient totalement neutres et donnaient la parole à toutes les opinions, on pourrait discuter, mais ce n’est pas le cas. De plus, étant financés par l’impôt, ils font une concurrence déloyale au secteur privé, qui ne peut se développer.
« La télévision doit tout inclure – nous devons permettre aux différentes voix qui font de nous ce que nous sommes d’être entendues… Il y a encore des voix qui ne sont pas assez entendues dans les médias israéliens », a déclaré Karhi.
- Il a ajouté qu’il avait l’intention de « renforcer la localité [juive] » en Samarie. « Nous devons leur fournir l’infrastructure nécessaire pour le faire ».
- Le nouveau ministre a également déclaré qu’il s’efforcerait d’annuler une décision de son prédécesseur Yoaz Hendel visant à assouplir les restrictions sur les forfaits cellulaires dits casher et à ouvrir le marché, une réforme à laquelle s’opposaient fermement de nombreuses autorités rabbiniques et des politiciens ultra-orthodoxes.
« Le ministre sortant a pris une décision concernant l’utilisation des téléphones portables dans la communauté haredi – une tentative d’intervenir dans les habitudes d’utilisation des particuliers », a déclaré M. Karhi. « J’ai l’intention d’annuler ce changement dans les prochains jours. Pour mettre en œuvre cette politique, je prévois de nommer Elad Malka comme nouveau directeur général du ministère. »
Malka a précédemment exprimé son soutien à la privatisation du radiodiffuseur public et même à la fermeture du ministère des Communications, une excellente décision : il y a totale contradiction : les journalistes sont le contre-pouvoir d’un Etat sain, et s’ils appartiennent et sont salariés du gouvernement, ils ne peuvent pas exercer leur métier.
Dans une chronique publiée dans le Makor Rishon le mois dernier, intitulée « Fermer le radiodiffuseur public ? » Malka a affirmé que le problème de Kan n’était pas son budget, mais « qu’il est en train d’achever le marché privé ».
Malka est le fondateur d’un groupe de lobbying appelé Our Interest – Your Lobby à la Knesset, qui appelle à rendre les marchés plus compétitifs. Avant cela, il était à la tête de l’organisation israélienne Media Watch, qui examine les politiques liées aux médias. Un vrai démocrate comme il en manque au gouvernement.
© Jean-Patrick Grumberg pour Israël 24 7.org