“Khaybar”, ou quand le Figaro passe le massacre de Juifs sous silence

Initialement publié le 5 décembre 2022 @ 15h03

Sous la rubrique « Voyages » Le Figaro du 30 novembre fait découvrir à ses lecteurs un monde inconnu : celui du royaume juif de Khaybar, au nord-ouest de l’Arabie saoudite. 

« Ce que l’on voit est d’autant plus stupéfiant qu’on en ignorait l’existence. C’est une tout autre histoire qui guide alors nos pas : l’occupation juive de Khaybar. Ci-gît leur royaume d’Arabie. Une pléiade de forts en ruines surplombent tels des îlots en papier mâché une mer de palmiers. Les auteurs arabes mentionnent sept, huit, voire neuf forts parfois avec des noms différents.»  

Pourquoi cet oubli et cette redécouverte tardive ? 

Jugée sensible, l’oasis était depuis interdite. Quasi inaccessible il y a encore quelques semaines.

« C’est un sujet délicat. Le toponyme est souvent employé à des fins idéologiques, en raison de la victoire du prophète et des compagnons, dont Ali, sur les populations juives locales » explique l’un des directeurs du projet.  

Et d’expliquer : « Une courte légende évoquait l’illustre bataille qui y opposa les tribus juives aux musulmans de Mahomet, qui en sortit vainqueur la septième année de l’hégire (628-629). »  

Courte légende ? De quoi s’agit-il au juste ? 

Avant même la destruction de Jérusalem et la déportation massive des Juifs de Judée, soit bien   avant l’apparition de l’Islam et la naissance de son prophète au septième siècle, des tribus juives vivaient dans la péninsule arabe. Leur présence s’est renforcée après cet exil et ils étaient nombreux autour du site de la présente ville de Médine. Marchands, fermiers, poètes, artisans et combattants, ils vivaient dans des forteresses, en ville ou sous la tente dans le désert. 

C’est auprès de voyageurs et de commerçants juifs que Mahomet, qui ne savait pas lire, découvre les récits de la Bible et va les incorporer dans le Coran, transformant rois et prophètes en précurseurs de l’Islam. Bientôt il va exiger des Juifs qu’ils acceptent la nouvelle religion et leur refus va provoquer un sanglant conflit, dont la bataille de Khaybar est le point d’orgue. En peu de temps il ne restera plus qu’un petit nombre de Juifs dans la péninsule.

Le souvenir de ce haut fait est l’un des éléments fondateurs du narratif islamique. Il suffit de consulter cet outil indispensable qu’est devenu Wikipédia pour l’apprendre :

« Dans le cadre de manifestations liées au conflit israélo-palestinien un chant antisémite faisant référence à la bataille de Khaybar est souvent utilisé  : Khaybar Khaybar ya Yahud, jaysh Muhammad sawfa ya‘ud (« Khaybar, Khaybar, ô Juifs, l’armée de Mahomet va revenir ») 

La version utilisée au Liban est Khaybar, Khaybar ya Sahyun, Hizbullah qadimun (« Khaybar, Khaybar, ô Sionistes, le Hezbollah est en route).   » D’ailleurs, ce mouvement terroriste a donné à l’un de ses missiles longue portée le nom de Khaybar. Quant à l’Iran, son nouveau fusil d’assaut s’appelle Khaybar KH-2002. 

Qu’importe. Des efforts sont en cours semble-t-il pour que Khaybar soit protégé et classé par l’Unesco au patrimoine mondial de l’humanité.

© Michèle Mazel pour Israël 24/7.org

Michèle Mazel est diplômée de Sciences-Po et licenciée en Droit, et a été boursière Fullbright en science politique. Pendant plus de trente ans, elle a accompagné de par le monde son mari, le diplomate Zvi Mazel, qui fut notamment ambassadeur d’Israël en Egypte, en Roumanie et en Suède. Elle en a tiré la matière de nombreux ouvrages – thrillers et romans. Elle contribue régulièrement à plusieurs organes de presse.

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