Comment le juge à la Cour suprême Aharon Barak a fomenté sa révolution judiciaire post-sioniste contre Israël

Aharon Barak, Begin et Moshe Dayan

Au cours des trente dernières années, la Cour suprême d’Israël est devenue le principal sujet du discours public et politique, il semble qu’elle intervienne dans presque tout, et les sondages montrent qu’une écrasante majorité de plus des deux tiers des Israéliens ne lui font pas confiance.

Les premières années, la cour était conservatrice et prudente et a établi les droits de l’individu dans le jeune pays dans une série de décisions célèbres qui touchaient à la liberté d’occupation, à la liberté d’expression et à de nombreux autres droits, même sans révolution constitutionnelle et sans compétition pour le pouvoir.

Un seul arrêt a annulé une loi de la Knesset durant cette période, et ce pour des raisons essentiellement techniques. La Cour évitait également de s’immiscer dans des affaires politiquement controversées et, lorsque le pays était en pleine tourmente au sujet de l’accord sur les réparations, elle a rejeté d’emblée les pétitions et n’est pas intervenue.

Puis en 1977, quelque chose s’est produit en Israël

Barak voulait que la gauche reprenne le pouvoir perdu. Il a très vite compris que pour atteindre son objectif, il devait supprimer les limites que s’imposaient les juges de la bonne Cour suprême et changer le système. C’est ainsi que la cause “d’extrême déraisonnabilité”, totalement opaque, totalement subjective, déconnectée des lois et dépendant du seul bon vouloir idéologique du juge a été créée, que les pouvoirs de la cour ont créé tous les plafonds, et ses domaines d’intervention ont été élargis.

La prochaine barrière à supprimer est celui de l’intérêt à agir. Si dans l’ancien tribunal, et dans la plupart des tribunaux occidentaux, seuls ceux qui étaient personnellement lésés pouvaient déposer une requête, désormais, n’importe qui pouvait déposer une requête sur n’importe quel sujet, même s’il n’est pas concerné personnellement et n’a aucun intérêt à agir.

Pour les moins versés dans le droit, je prends un exemple. Vous croisez une voiture dont le conducteur roule sans ceinture. Vous n’êtes pas policier, vous n’êtes pas lésé, vous n’avez aucun préjudice, vous n’êtes pas discrètement concerné par le fait qu’il enfreint la loi. Vous ne pouvez donc pas porter plainte contre lui – il vous manque “l’intérêt à agir”. Barak a fait sauter cette barrière ce qui permettait à des activistes, des militants antisionistes, des ONG financées par l’UE avec des intentions hostiles, de déposer plainte devant la Cour suprême israélienne sur n’importe quel sujet.

Depuis lors, les portes du tribunal sont grandes ouvertes à tous ceux qui veulent nuire à Israël, au gouvernement, à ses décisions, et vous le savez, ils sont très nombreux. Depuis que les vannes ont été ouvertes sur le droit d’ester en justice, le nombre de pétitions adressées à la Haute Cour a augmenté de plus de trente pour cent chaque année et ce nombre ne cesse d’augmenter.

C’était l’étape clé.

Après que Barak ait installé le pouvoir de la Cour suprême au dessus du pouvoir exécutif, et qu’elle avait le dernier mot sur toutes les décisions du gouvernement – c’était fondamental pour Barak puisque la droite venait de gagner les élections – il ne restait plus qu’un seul corps plus fort que la Cour suprême : le pouvoir législative, la Knesset, c’est à dire les élus, qui sont les seuls représentants du peuple, la seule expression de la démocratie. Il se trouve, cependant, que la Knesset n’a pas mis longtemps à tomber dans le piège, et à stupidement renoncer à ses pouvoirs au bénéfice de la Haute cour. Et voilà le travail : la deuxième étape de la révolution anticonstitutionnelle et antidémocratique était achevé.

Sachant qu’il était le décisionnaire final, ce juge à la Cour suprême avait désormais les mains libres, et il avait donné les moyens aux ONG d’extrême gauche de lui apporter sur un plateau les dossiers fondamentaux sur lesquels il voulait peser : il savait quel genre de plaintes ces ONG déposeraient devant lui.

C’est pourquoi les Israéliens, ayant élu une Knesset de droite en espérant les voir appliquer une politique de droite, se retrouvent depuis avec des décisions politiques très différentes, bien plus à gauche, que ce qu’ils désirent.

1992 : Loi fondamentale sur la dignité humaine et la liberté

Le soir du 17 mars 1992, la Knesset a adopté une loi d’une importance révolutionnaire – la Loi fondamentale sur la dignité humaine et la liberté qui, avec la Loi fondamentale sur la liberté d’occupation, a donné à Aharon Barak les outils pour développer une nouvelle méthode qui donnait au tribunal le pouvoir d’annuler les lois de la Knesset.

Et pourquoi la Knesset ferait-elle une telle chose ? Parce que sur le moment, ils n’ont pas compris grand-chose. Barak était bien plus fort qu’eux, et ils les a fait tomber dans un piège mortel pour le sionisme. Très vite, mais trop tard, la vérité est devenue claire : dans une série d’arrêts, Barak a transformé les nouvelles lois fondamentales en un outil qui permettait au tribunal d’annuler les lois de la Knesset. Le principal est l’arrêt Bank Mizrahi de 1995, dans lequel Barak a fondé sa nouvelle structure constitutionnelle.

Du jour au lendemain, fait rarissime dans toute démocratie digne de ce nom, la Cour suprême intervenait elle-même pour écrire la Constitution. Une hérésie démocratique absolue, créée parce que Barak considérait que sa pensée et sa vision étaient supérieures à celles de toute la population israélienne réunie.

Depuis cette révolution inconstitutionnelle, la méthode de Barak est devenue une vérité qui ne doit pas être remise en question parce qu’elle sauve les idées de gauche, les idées post-sionistes, les idées qui avancent ver le remplacement de l’Etat juif par l’Etat de tous les citoyens. Et ceux qui tentent de s’opposer ou de proposer des changements se heurtent à une campagne agressive – avec l’aide des médias qui eux aussi sont de gauche et ont des billes idéologiques dans l’affaire – dans laquelle tous les coups sont bons. Dans toute révolution totalitaire, l’une des choses les plus importantes est l’élimination des opposants et la répression de toute dissidence.

Mais l’histoire du peuple juif en a décidé autrement. Les Israéliens, je l’ai dit, ne tiennent pas la Haute cour en haute estime. Ils votent de plus en plus à droite. Ils rejettent de plus en plus l’extrême gauche et les socialistes – les premiers ont été éjectés de la Knesset faute d’électeurs, et les second ont été à deux doigts d’en être exclus.

Reconnaître la révolution – et se battre : l’histoire de l’avocat Dror Hoter Yishai

Le premier à reconnaître la révolution anticonstitutionnelle et à affronter frontalement Aharon Barak a été l’avocat Dror Hoter Yishai. Lorsque Hoter Yishai a pris ses fonctions de président de l’Association du Barreau, il est entré en collision avec Aharon Barak. Le premier problème était l’initiative de Barak de changer la structure des tribunaux. Un autre clash entre Hoter Yishai et Barak s’est produit au sein du comité de nomination des juges, lorsque Barak a voulu promouvoir une certaine femme juge.

Mais le juge Barak a commencé à se défendre, c’est à dire à attaquer. Il a d’abord essayé de diviser l’Association du Barreau, et lorsque cela n’a pas fonctionné, le système d’application de la loi est entré en action. Hoter Yishai a été accusé dans trois affaires différentes – et acquitté dans chacune d’entre elles. Les enquêtes à son encontre n’ont cessé qu’après sa démission de son poste de chef du bureau. Barak avait gagné.

© Jean-Patrick Grumberg pour Israël 24 7.org

Traduit, adapté et commenté depuis un article paru sur :

Source : Now14.co.il

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