Ce qui s’est dit durant la réunion secrète du groupe Bilderberg sur le conflit israélo-arabe – octobre 1957

Initialement publié le 3 janvier 2022 @ 7h20

L’on doit à Wikileaks la publication d’un certain nombre de réunions secrètes du groupe Bilderberg. Voici celle du 4 au 6 octobre 1957 qui s’est tenue dans la petite ville de Fiuggi, en Italie, et la partie traitant du conflit israélo-arabe, qui pour être conforme à la réalité, devrait s’appeler conflit arabe-israélien du fait que ce sont les Arabes qui sont en conflit avec Israël, et non l’inverse.

Compte rendu de la réunion

(c) Le Moyen-Orient

Si la Russie a perdu du terrain sur le front européen, elle en a gagné beaucoup au Moyen-Orient. L’un des participants a affirmé que l’on n’avait pas suffisamment réalisé que le problème ici n’était pas le communisme en tant que doctrine politique, mais la Russie en tant qu’influence diplomatique. La Syrie, par exemple, ne devenait pas communiste – il serait tout à fait trompeur de la comparer aux États satellites d’Europe de l’Est. Mais la Syrie était en train de devenir un État vassal de l’Union soviétique sous le contrôle d’agents et de prête-noms russes.

La Russie avait utilisé ses livraisons d’armes pour étendre son influence politique. L’armée, en particulier les unités blindées et les services de renseignements, étaient aux mains de larbins russes et cela suffisait à donner à la Russie une influence décisive au sein du gouvernement syrien.

Les objectifs ultimes de la Russie au Moyen-Orient sont d’encercler la Turquie, d’évincer l’Occident de ses bases militaires, de couper son approvisionnement en pétrole et de lui refuser le libre usage du canal de Suez. L’Occident doit donc soutenir la Turquie et sécuriser son approvisionnement en pétrole en construisant des super-tankers et des oléoducs supplémentaires via la Turquie.

L’un des participants a estimé que nous devrions également revoir notre attitude à l’égard du colonel Nasser, aussi désagréable que cela puisse être. On a fait remarquer que la plus grande partie du tonnage qui s’est récemment ajouté à la flotte mondiale de pétroliers est enregistrée sous le pavillon du Panama ou du Libéria ; elle n’est donc pas sous le contrôle direct des gouvernements occidentaux et, en cas de crise, elle pourrait bien être retirée pour servir d’autres clients. Il est généralement admis que les pays occidentaux devraient avoir une politique commune au Moyen-Orient, d’autant plus qu’ils souffrent tous des mêmes graves limitations de leur liberté d’action. Par exemple, ils se sont engagés à préserver Israël en tant qu’État distinct au Moyen-Orient, bien que les Arabes considèrent Israël comme leur principal ennemi. Ils ne pouvaient donc pas jouer la carte du nationalisme arabe avec autant de succès que la Russie. Les crises se succédant dans la région, l’Occident n’a jamais été en mesure de développer et de clarifier une ligne générale de politique pour le Moyen-Orient. L’une des principales difficultés était la dissémination aveugle d’armes entre les États arabes et Israël. Certains participants ont estimé que l’Occident devait explorer la possibilité de parvenir à un accord sur un embargo sur les armes au Moyen-Orient. D’autres ont estimé que la possibilité d’un tel accord était si éloignée qu’il ne valait pas la peine de mettre en péril les relations avec nos alliés arabes pour y parvenir.

Il fallait admettre que si les pays occidentaux étaient d’accord en principe sur la nécessité d’une politique commune au Moyen-Orient, ils étaient encore loin de l’avoir réalisée.

Chaque pays occidental avait tendance à choisir un État du Moyen-Orient comme son client particulier et à rechercher l’amitié avec lui au détriment de bonnes relations avec l’ensemble de la région.

Mais beaucoup de ces États utilisaient l’aide qu’ils recevaient de leurs protecteurs pour poursuivre des conflits privés avec les clients d’autres puissances occidentales. Les récents troubles à Oman en sont un bon exemple.

Un participant a estimé qu’en héritant de la position de la Grande-Bretagne et de la France en tant que puissances occidentales prédominantes au Moyen-Orient, les États-Unis avaient copié certaines des erreurs politiques de leurs prédécesseurs, en particulier une confiance excessive dans les anciennes classes dirigeantes qui étaient appelées à disparaître dans un avenir proche. C’est une erreur de s’appuyer sur le patriotisme artificiel des familles royales plutôt que sur le nationalisme des classes montantes, qui accordent beaucoup plus d’importance au concept d’unité panarabe qu’aux frontières étatiques existantes. D’autres intervenants ont souligné que, aussi souhaitable que soit en théorie l’identification de l’Occident avec les groupes révolutionnaires du monde arabe, dans la pratique, nous devions accepter la situation politique telle qu’elle était aujourd’hui et coopérer avec les groupes au pouvoir. En outre, dans certains cas, les anciens groupes au pouvoir contenaient les éléments les plus progressistes et les plus constructifs.


A cet égard comme à d’autres, le véritable désaccord au sein de la Conférence portait sur la priorité des politiques à long terme par rapport aux expédients à court terme.

Personne n’a nié la nécessité de l’intervention américaine pendant la crise jordanienne, mais certains participants ont estimé que le succès de cette intervention avait induit l’Amérique en erreur en lui faisant croire qu’il s’agissait d’un précédent qui pourrait être suivi avec succès ailleurs. A long terme, l’Occident doit trouver un meilleur moyen d’entrer en contact avec la grande masse de l’opinion arabe et avec les groupes politiques et sociaux qui la représentent dans la pratique. Plusieurs participants ont attiré l’attention sur les graves lacunes de la propagande occidentale à l’égard du monde arabe. La radio du Caire a toujours une influence écrasante au Moyen-Orient. Quoi que l’on puisse et doive faire pour faire face aux crises immédiates lorsqu’elles se présentent, l’Occident doit essayer de développer une politique à long terme. Il semble que la doctrine Eisenhower, qui avait été accueillie lors de la dernière conférence comme la preuve d’un intérêt positif des Américains pour la région, soit déjà en train de perdre sa pertinence dans le domaine militaire. Dans le domaine économique, en revanche, elle restait valable et plusieurs participants ont estimé que c’était le domaine le plus prometteur pour une initiative occidentale.

Un orateur a souligné l’importance d’une approche régionale au Moyen-Orient. Tant que la région sera traitée comme une mosaïque d’entités économiques distinctes, il y aura peu de possibilités d’intervention fructueuse. Plusieurs participants ont appelé à un nouvel effort occidental pour résoudre le problème des réfugiés arabes, qui constitue un obstacle majeur à l’amélioration des relations entre les États arabes et Israël.


Il a toutefois été souligné que le développement économique au Moyen-Orient soulevait les mêmes problèmes qu’en Asie ou même en Europe pendant la révolution industrielle. Si les peuples arriérés ont accès aux techniques modernes et à un niveau de vie du XXe siècle, ils doivent également être guidés vers la démocratie politique, sinon le chaos social créé par un développement économique rapide offrirait au communisme de nouvelles opportunités. C’est pourquoi l’un des intervenants a estimé que les problèmes du Moyen-Orient devaient être considérés conjointement avec ceux de régions similaires en Asie, et qu’il fallait faire davantage pour relier les problèmes de l’Extrême-Orient et du Moyen-Orient.

© Equipe de rédaction Israel247.org.

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