Le Premier ministre Naftali Bennett a publié vendredi une lettre ouverte à l’intention du public israélien, appelant à son soutien pour maintenir en vie sa coalition vacillante, dans, dit-il, « l’intérêt de la stabilité politique et du bon fonctionnement du gouvernement », après la publication de sondages d’opinion d’un public mécontent de son gouvernement.
Cette initiative est aussi inhabituelle que son gouvernement. Sa lettre coïncide avec le premier anniversaire de la mise en place du gouvernement, alors que celui-ci va d’une crise à l’autre depuis qu’il a perdu sa majorité parlementaire début avril, et semble se diriger vers un effondrement.
La lettre souligne les craintes de Bennett, le spectre de nouvelles élections, le défi lancé par le leader de l’opposition Benjamin Netanyahu.
Bennett a présenté sa coalition comme ayant apporté la stabilité politique en Israël. La stabilité ne s’est pas réalisée. Le Premier ministre a demandé au public de l’aider à maintenir cette stabilité, mais le public lui fait moins confiance. Il critique les attaques de l’opposition, oubliant comment l’opposition critique toujours le gouvernement.
« Il y a environ un an, l’État d’Israël a connu l’un des moments les plus difficiles qu’il ait jamais connus », a écrit M. Bennett.
« Chaos, tournoiement électoral sans fin, paralysie du gouvernement, les villes de Lod et d’Acre brûlant face à un gouvernement humilié et en conflit », a-t-il ajouté, faisant référence aux émeutes dans les villes arabo-juives pendant la guerre de l’année dernière déclenchée par les groupes terroristes de Gaza.
Israël a fait preuve d’une « terrible faiblesse face à un ennemi meurtrier qui a tiré des roquettes sur Jérusalem », a-t-il ajouté, et a été piégé par « le culte d’un seul homme [Netanyahou] et l’asservissement de l’énergie de l’État à ses besoins juridiques » [les procès de corruption contre l’ancien Premier ministre, qui réapparaissent opportunément avant les élections, et semblent désormais être proches de non-lieux].
M. Bennett dit avoir « bricolé sa coalition » l’année dernière – à partir d’un amalgame disparate de partis de droite, centristes et de gauche – il oublie l’extrême gauche – ainsi que de la faction islamiste Ra’am – pour sauver le pays, malgré les critiques sévères d’autres partis de droite, et bien qu’il n’ait récolté que 6 sièges lors des élections – un chiffre qui indique que le public ne voulait pas de lui.
« Nous nous tenions à quelques jours d’un cinquième cycle électoral [c’est vrai] qui aurait fait voler le pays en éclats [spéculatif, il n’en sait rien], et j’ai alors pris l’une des décisions les plus difficiles et les plus sionistes de ma vie [c’est plus que probable] : établir un gouvernement pour sauver Israël du chaos et le faire fonctionner de nouveau. Se rapprocher de personnes ayant des opinions différentes des miennes pour sauver le pays », a-t-il écrit [son appât du pouvoir n’est pas présent des motivations qu’il invoque, il n’allait pas le confesser].
Bennett a déclaré qu’il savait à l’époque qu’une puissante « machine empoisonnée » se retournerait contre lui, mais il s’est associé aux différents partis pour « défendre l’État d’Israël », autrement dit, pour lui, une nouvelle élection était plus dangereuse que la présence de l’extrême gauche antisioniste au gouvernement, et d’un parti arabe – qui a toute sa place vu la proportion d’environ 16% de musulmans dans le pays, mais ne devrait pas posséder du pouvoir de chantage ? Difficile de le suivre dans ce raisonnement.
« Avec mes collègues du gouvernement, nous avons ramené Israël à la fonctionnalité et à la croissance [le gouvernement précédent affichait aussi une croissance exemplaire, quant au dysfonctionnement, il serait difficile de soutenir que le gouvernement Bennet fonctionne, lui qui appelle à l’aide le public] », a déclaré Bennett, ajoutant qu’Israël se trouvait à nouveau à un « carrefour historique » [?]
« Aller de l’avant avec un État fonctionnel, ou sombrer à nouveau dans le chaos, la haine interne, la faiblesse externe et l’asservissement de l’État aux besoins d’un seul homme [« le seul homme » en question, on est en droit de le détester, d’en être fatigué, mais on ne peut nier qu’il a admirablement servi l’Etat d’Israël pendant le temps qu’il l’a dirigé] », a déclaré Bennett, faisant à nouveau référence à Netanyahou.
Bennet a déploré qu’« il n’y ait actuellement qu’un seul camp sur le terrain – la machine à poison bruyante et mortelle » des législateurs de l’opposition tels que Netanyahou, Itamar Ben Gvir, Ayman Odeh et Bezalel Smotrich. « Ils déclenchent la violence, l’extorsion et les “fake news”, tandis que la majorité silencieuse est satisfaite d’un gouvernement calme et qui fonctionne ». D’une part, la majorité silencieuse n’est pas satisfaite, de l’autre, l’opposition n’a jamais été autrement que bruyante, enfin, rappelons que c’est strictement son rôle. Libre à Bennet de la qualifier de « machine à poison ».
« Si nous ne voulons pas reculer, nous devons tous agir. Cette lettre est un appel à l’action », a déclaré M. Bennett.
En réponse à la lettre du Premier ministre, le parti Likoud de Netanyahu a déclaré :
« Les mensonges de Bennett ne peuvent pas couvrir le fait qu’il a cédé le contrôle du pays à Mansour Abbas [de Ra’am], Ahmad Tibi [de la Liste commune de l’opposition] et leurs amis qui soutiennent le terrorisme ».
« Les prix de l’essence, de la nourriture et du logement battent des records pendant que Bennett et [le ministre des Affaires étrangères Yair] Lapid ne font rien », a-t-il déclaré.
Précisons que le prix de l’essence, ce n’est pas de la faute du gouvernement Bennet, mais de Biden, le prix de la nourriture et du logement, ce n’est pas nouveau – sauf qu’au début de son mandat, la coalition Bennet a promis de s’attaquer au problème – Israël 24/7 en a parlé – et les mots ne sont pas allés plus loin que le bout de leur langue : s’ils ont fait quelque chose, ce fut discret, car ils n’ont obtenu aucun résultat.
Le Likoud promet de « tout faire pour faire tomber ce gouvernement de faiblesse et d’échec », mais sa difficulté, que confirment tous les sondages, est que Bibi ne pourrait toujours pas dépasser les 59 sièges qui lui permettraient de former un gouvernement.
Un sondage réalisé la semaine dernière a révélé que la plupart des Israéliens pensent que le gouvernement actuel s’effondrera dans les six mois, que plus d’Israéliens soutiennent Netanyahou comme Premier ministre que tout autre candidat – pas assez pour lui donner une majorité, et que 70 % des Israéliens en ont assez des Arabes au gouvernement, et n’en veulent plus.
© Jean-Patrick Grumberg pour Israël 24 7.org
Source : https://news.israelinfo.co.il