La pièce traite d’une famille de Juifs français et de l’incertitude que ressentent les Juifs du monde entier quant à l’endroit où ils vivent.
« Nous sommes peut-être à l’aise aujourd’hui », affirme la pièce, « mais pour combien de temps ? Les actes violents d’antisémitisme nous amènent à nous demander : « Sommes-nous en sécurité ? Serions-nous plus en sécurité ailleurs ? »
Le frère et la sœur, Patrick Salomon et Marcelle Salomon Benhamou, représentent les deux faces du problème juif.
- Patrick est assimilé au point que ni lui ni ses enfants n’observent les fêtes juives.
- Marcelle, quant à elle, a épousé un juif algérien et dit à une jeune cousine américaine en visite, qu’elle se considère comme « traditionnelle ».
- Marcelle et son mari Charles sont tous deux des médecins prospères, lui avec un grand cabinet et elle en tant que chef de service de psychiatrie.
- Leurs deux enfants adultes, Elodie et Daniel, vivent toujours avec eux.
- Charles dit de sa famille qu’elle a vécu en Algérie pendant 500 ans, et en Espagne pendant un millier d’années avant cela, marquant le mouvement de la famille autour de la Méditerranée avec l’Inquisition espagnole et la montée du nationalisme islamique.
La famille Benhamou voit sa tranquillité troublée au début de la pièce lorsque Daniel rentre chez lui après avoir été agressé dans la rue, en grande partie parce qu’en tant que professeur de mathématiques dans une école juive, il porte une kippa.
Les élections impliquant la dirigeante du Front national Marie Le Pen et Donald Trump aux États-Unis ont mis les Benhamou en état d’alerte [la presse de gauche, conspirationniste, a donné à croire que Trump était antisémite, ce qui est un mensonge absolu, quant à Marine Le Pen, le débat n’est pas clos : des juifs pas plus bêtes, pas moins informés, et pas moins attentifs que les anti, votent pour le RN]. Donc Charles ne se sent plus en sécurité et souhaite que la famille émigre en Israël.
Ils vivent dans l’appartement où Marcelle et Patrick ont grandi, et ils partagent la scène avec leurs ancêtres, ceux qui ont survécu à l’Holocauste. Irma et Adolphe Salomon, les arrière-grands-parents, ont vécu la guerre enfermés dans le calme relatif de leur appartement parisien, mais leurs enfants se sont échappés ou ont été victimes des nazis, et les personnes âgées passent leur temps à imaginer leur progéniture saine et sauve. Ce n’est pas le cas, bien sûr, pas tous. Ceux qui le sont reprennent l’entreprise familiale centenaire, la vente de pianos.
Pour ces Juifs français, l’Holocauste fait autant partie de leur histoire personnelle que leurs pianos.
Pierre épouse une femme catholique et Patrick se marie lui aussi en dehors de la foi, mais même lui n’a pas oublié. En tant que narrateur de la pièce, Patrick régale le public d’histoires de massacres de Juifs en France remontant jusqu’aux Croisades. La vulnérabilité ressentie de la famille Benhamou conduit « Prière pour la République française » à sa conclusion émouvante.
Le scénario de l’auteur, Joshua Harmon, se déroule rapidement. La « Prière pour la République française » fait rire et pleurer, car la famille se bat avec et pour son passé, et son avenir. Surtout, la pièce raconte une histoire complexe non seulement sur les Juifs, mais aussi sur un monde en mutation dont l’antisémitisme, désormais passé dans le camp de la gauche, n’est jamais loin.
© Jean-Patrick Grumberg pour Israël 24 7.org