Unité Israël-Diaspora autour de Jérémie Cohen z’l, 12ème victime d’un terrorisme sans frontière

Jérémie Cohen

La France bat tous les records européens, en matière de sacrifices humains Juifs, au nom des bienfaits supposés de l’immigration pour son économie libérale et sa natalité en récession. Je ne tiens pas de décompte qui entretienne la mémoire, mais chacun de ceux assassinés, depuis Sébastien Sélam z’l, compte pour l’unique qu’il était aux yeux de ses proches. Depuis 2003, on n’a pas la main lourde en supposant qu’ils représentent une quinzaine… 

Cette fois, je n’apprends qu’hier, 4 avril, par quelque horrible ironie du sort, date calendaire de l’assassinat de Sarah Halimi, dans une ambiance politique apparentée (pendant un cycle électoral), que des racailles de Bobigny ont poussé Jérémie Cohen, un jeune déficient léger qui,– selon certains témoignages, n’aurait pas, à ce moment, arboré sa Kippa, à se jeter sous un tramway pour échapper à ses tortionnaires.

Je suis nouveau réfugié dans mes hauteurs de Galilée depuis un mois, mais, semble-t-il, la France entière n’a rien appris de plus, j’allais dire depuis 2017, en tout cas depuis ce même jour que moi, sur cet étrange exercice de barbarie déchaînée. Elles sont déjà audibles, les minorisations de tous les procureurs aux ordres, dans la foulée du sinistre Molins, qui ne manqueront pas de ranger ce meurtre abominable dans une sous-catégorie du fait divers, enfin, qu’en tout cas on ne puisse pas qualifier de «barbare», comme s’il y entendait quelque chose avec sa gueule de sacristain.

En matière de décompte –n’en déplaise à Zemmour, à propos des victimes de Toulouse, et cette fois, il a prestement réagi en informant le grand public du signalement porté à sa connaissance par le père de la victime – ici en Israël, nous venions de vivre une vague de 3 attentats à Beer-Sheva, Hadera et Bnei Brak. Ils ont fait 11 morts, dont une jeune policière des Frontières (Magav) originaire de Marseille, Shirel Abukarat, en compagnie de son collègue Druze, Yezen Falah. A Bnei Brak, on n’a dû qu’à la réaction salvatrice et au sens du sacrifice du policier Amir Khoury, 32 ans, de Nof Hagalil, à moins de 43 km d’ici où je me trouve, que le carnage ayant emporté 4 autres personnes ne s’arrête. Il en est mort et, nous protégeant, c’est l’un des nôtres, comme tant autour de nous qui n’ont pas la moindre intention de nous assassiner, au contraire, malgré les appels des prêcheurs de haine.

Jérémie, que nous n’avons pas pu protéger de ses bourreaux, nous peuple d’Israël présent ou diasporique –, vient donc s’ajouter à un «cycle», de violence, s’il ne s’agit pas «exactement» de la même terreur :

Car qu’y aurait-il de plus «terrorisant» que de faire en sorte qu’une victime préfère se jeter sous un train que de finir entre les mains de ceux qui le tabassent «à mort» ? La violence de l’ensauvagement est la même, ses ressorts sociopolitiques, le contexte sont différents.

L’enquête française, qu’on dit à peine entrouverte au titre de «l’information judiciaire», endurcie par les dénis accumulés lors du non-procès Sarah Halimi, refabriqué comme une sorte de précédent et de non-lieu idéal en matière d’antisémitisme pourtant avéré, va terriblement ergoter pour minimiser, une fois encore, des circonstances débouchant sur la mort «sans intention de la donner» : s’acharner à dix contre un sur un jeune handicapé, au point qu’il ne sente plus d’autres issues que de foncer sous un tramway va certainement bénéficier de l’excuse de l’absence «d’intentionnalité» ! La France va, comme lors d’épisodes d’actes répétitifs d’un feuilleton interminable, trouver une nouvelle occasion de perdre toute humanité, en abolissant toute conscience du bien et du mal par voie de «Justice».

Déjà, le candidat dominant, sans doute en cela conseillé par McKinsey (pas grand-chose), va-t-il botter en touche, comme il s’y exerce depuis son premier coup d’essai le 4 avril 2017, en réclamant «toute la transparence» sur un événement dont il attend que le temps l’emporte aux mauvais vents. Au nom de la séparation des pouvoirs, on laissera sans doute quelque juge éludant d’avance toute preuve, comme Anne Ihuellou, de mémoire honnie, faire ce qu’il «convient» pour classer l’affaire.

En justice comme dans la rue, il faut une attention redoublée à tous ces isolés à l’écart de l’enveloppe communautaire, femme seule et âgée, jeune handicapé momentanément esseulé, pour réduire nos fractures et l’insulte à la raison du plus faible que sont ces instructions d’une Justice depuis trop longtemps déviante ou tellement induite de préjugés politisés.

On ne peut pas, non plus, attendre des Juifs de France dans leur ensemble qu’ils se résolvent massivement à opter pour les choix que nous avons librement opérés, parce qu’en capacité de le faire. Même leurs instances, dans la posture des «malgré nous», sont là pour les maintenir «le moins mal possible» dans ce climat, donc en passant des compromis avec un pouvoir inepte, qui n’a jamais pris la mesure des événements, depuis Lam’C et la Seconde Intifada, sous la chape de plomb d’une désinformation qui ferait de l’Israélien un être prompt à ségréguer par nature, quand ce n’est pas un mangeur de petits Mohamed, à l’heure de partager la matza de Pessah.

Si, face à de tels actes et une telle montagne d’indifférence dans un climat électoral qui ne sait plus bien qui ferait l’affaire, il ne doit nous rester que notre dignité, notre résilience, notre force de caractère à surmonter et à questionner ceux qui observent tout cela avec passivité moutonnière et sens consommé de «l’en-même-temps», alors nous devrons leur opposer notre unité forgée ici ou là-bas, hier, demain et maintenant.

Comme nous intégrons Amir et Yezen à la mort de Shirel, Jérémie et des huit autres enfants d’Israël, il n’est pas question d’apporter satisfaction à nos détracteurs en laissant les victimes juives de France devenir la variable d’ajustement d’une immigration aussi incontrôlée qu’ensauvagée. Nous savons apporter le sens juif du discernement dans l’évaluation d’une communauté ou d’une société unificatrice et profondément intégratrice, parce que forte, si jamais la France a totalement perdu de vue, depuis plus de quarante ans, ce que ces points de repère voulaient dire. Car, à travers Jérémie, c’est la France entière qui tombe, celle-ci ne doit plus s’y tromper et il n’y aura personne pour la rattraper, la relever. J’en ai fait mon drapeau en berne, mon deuil…

L’expérience de vie collective et de travail, ici, en Galilée, mériterait d’être étayée et approfondie, à tel point elle s’éloigne des clichés qui occupent l’esprit de tant de Français au cerveau depuis si longtemps délavé, comme cette Agnès Callamard, qui ne pouvait être que le rejeton d’une éducation dominante sous cette bannière, pour illustrer à ce point, toute honte bue, la pensée d’un mollusque.

Je travaille au milieu de mes collègues pratiquants et non-pratiquants, juifs, chrétiens, musulmans, Russes, Américains, Ukrainiens, Éthiopiens et autres Africains de l’Est, hispanisants ou adoptant un style de vie complètement détaché des critères religieux. Ils m’ont accueilli et font partie de ce tissu professionnel et social depuis plus longtemps que moi, ont tous des choses à m’apprendre. Pour aucun, je ne figurerais un insupportable «envahisseur» ou un «colon» venu profiter d’un bout de terre mal méritée. Sabreen ou Zeev aimeraient que je leur apprenne quelques mots de français chaque jour, à mesure que j’avancerai en hébreu, pourquoi pas en arabe ou en toute autre forme d’interprétation de notre tour de Babel si colorée…

Je suis bien parmi eux, ensemble nous sommes forts, je sais que nul ne songerait à nous pourchasser, comme Jérémie, resté à jamais sous le tramway, à Bobigny, en France… Que quiconque nous regarde droit dans les yeux et nous dise que «ce n’est pas notre place», ici et même à Bobigny, dans cette France, mère blafarde, sans visage, qui s’en trouvera un de circonstance d’ici moins de trois dimanches, pour tenter de faire bonne figure, la même qu’hier, la même que demain, celle du «en même temps»… de la confusion et de l’irresponsabilité chronique.

Je n’avais plus envie d’en être, ça n’a rien de personnel, mais mon choix est conforme à ce que ressentaient mes tripes, depuis bientôt 22 ans d’antisémitisme carabiné et ce peloton de fusillés, brûlés vifs, torturés, passés par les fenêtres ou sous les tramways avec tous comme un air de «déjà-vu».

© Marc Brzustowski pour Israël 24/7

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