Jérusalem n’est plus en Israël : le sens du vote de l’ONU

Par Shmuel Trigano
Professeur émérite des Universités

L’Assemblée générale de l’ONU a adopté par 129 voix contre 11 et 31 abstentions une résolution renommant islamiquement « Haram el sharif »,le « Mont du Temple », et Al Kuds. « Jérusalem ». Elle entérine la manipulatioon des islamistes qui ont décrété que toute la montagne du Temple antique était incluse dans le périmètre de la mosquée El Aksa , c’est à dire ipso facto un lieu de culte exclusif pour les musulmans, c’est à dire interdit aux Juifs qui aujourd’hui même, sur toute l’étendue en dehors du bâtiment stricte de la mosquée. A ce jour les Juifs non pas le droit d’y prier même en silence dans l’espace le plus saint du judaisme. La police israélienne met en œuvre cette intolérance qui crie jusqu’au ciel et expulse sans ménagement les Juifs qui y contreviennent. La Jordanie en a profité du vote de l’assemblée pour prétendre que la montagne ainsi que les lieux saints chrétiens (!) de la ville – qui dans toutes les résolutions est appelée « El Kuds »- était sous la tutelle de son roi. L’ONU légalise ainsi les dessous les plus noirs du « vivre ensemble ».

C’est là une violence symbolique qui n’a d’égal que celle de l’empereur romain qui après avoir détruit la Jerusalem évidemment juive la renomma Aelia Capitolina pour effacer son nom et nomma Eretz Israe,l « Palestina », du nom des plus grands ennemis d’Israël, les Philistins, des envahisseurs grecs établis le long du littoral entre Ashdod et Gaza, un nom, Pelishtim qui signifie expressément les « envahisseurs ». Ce n’est que 7 siècles plus tard qu’avec l’invasion islamique Jerusalem devint El Kuds. Les Palestiniens d’aujourd’hui méritent ainsi bien leur nom. Ils ne furent d’ailleurs jamais une entité avant la création d’Israel.

Outre la violence que représente cette opération d’écriture d’hier et d’aujourd’hui – en effet on change le nom de quelqu’un avant de s’attaquer à lui – elle révèle quelque chose qui en règle générale reste dans l’obscurité, à savoir le substrat religieux, antijudaique ou non selon les cas, qui préside au vote des Etats concernant Israël à l’Assemblée générale. J’entends que dans l’imaginaire politique collectif, même pour les Etats éloignés leur passé religieux, le rapport aux Juifs qui fut marqué tout au long de l’histoire par la religion est toujours à l’œuvre.

Il faut en effet se souvenir que le christianisme et l’islam sont des religions nées du judaisme, des religions concurentes qui ont voulu oblitérer le judaisme pour mieux occuper sa place métaphysique et s’instituer comme l’élu. Il y a ainsi une concurrence identitaire inéluctable entre elles. La résurgence d’Israël, de sa souveraineté sur le Mont du Temple représente pour elles un scandale qui menace leur identité et leur légitimiité. C’est le mort qui se lève de son tombeau alors que c’est sur cadavre qu’on avait prononcé l’intronisation de ses successeurs.

De ce point de vue, il est intéressant d’analyser le fond religieux des votes des puissances.
Le vote des pays musulmans est attendu. L’attitude islamique découle en effet du Coran qui a occulté ses racines bibliques et chrétiennes. L’islam avance qu’il est la vraie parole divine, la parole originelle dont la Bible hébraïque n’est qu’une version falsifiée. Il substitue ainsi le Coran à la Bible et il en découle que le premier homme était musulman comme tous les personnages bibliques de sorte que la Oumma est la légitime propriétaire de toute la terre. A l’inverse des chrétiens qui la conservent comme « Ancien Testament » auquel ils rajoutent un « Nouveau testament » de sorte que leur rapport aux Juifs est différent: conservés quoique tenus à distance. Le monde chrétien ainsi ne nie pas comme le monde musulman l’antériorité des Juifs à Jérusalem mais vise plutôt à empécher qu’elle ne soit la capitale d’un Etat juif. Il est significatif de constater que les Etats d’Europe centrale et orientale, le « groupe de Wizegrad », ont voté contre la résolution, alors que la Belgique, l’Italie, l’Espagne et..la France (« laïque et répubicaine »?) ont voté pour la résolution. Les premiers tiennent farouchement à leur identité catholique face à l’immigration et à l’islam alors que l’Europe de l’ouest est sur ce plan là dans le déclinisme qu’a promu l’idéologie postmoderniste. On mesure à ce propos où en est la France quant à son identité. A l’opposé, il est symptomatique que la Grande Bretagne et les Etats-Unis se sont fermement opposés à la résolution, une expression directe de leur identité protestante qui redécouvrit la Bible hébraique et la philosophie politique qu’elle leur a inspirée.

Il reste une religion, la partie juive, l’Etat d’Israël. Elle est l’objet d’une déligimation déguisée de la part de l’ONU (ou, rappelons le, l’influence de l’Organisation de la conférence islamique est puissante) qui contribue à faire d’Israël un Etat sans fondement historique. Le problème cependant c’est que le leadership israélien n’est pas lui même au clair sur ce point. En fait, la situation actuelle découle d’une défaillance morale et stratégique d’Israël. Quand le vainqueur de la guerre des 6 jours Moshe Dayan s’est retrouvé devant le Mont du temple il a fui le face à face avec le destin juif qui remettait entre les mains de l’Etat d’Israël, alors agressé par la Jordanie, ce cadeau inattendu. il s’est écrié « que va-t-on faire de tout ce Vatican là? » et il remit les clefs du Mont au mufti jordanien avec l’accord du cabinet et du Parti National Religieux (Mafdal) notamment. Depuis, dans cette incapacité à assumer le destin juif, le Mont du Temple est devenu le fief du mouvement islamiste israélien, son mufti est nommé par l' »Autorité palestinienne », qui ne manque pas de pratiquer l’incitation à la violence et le Hamas s’est institué son protecteur. La premier missile sur Jerusalem a été tiré de Gaza lors de la dernière confrontation pour interdire le défilé des drapeaux. Jérusalem restera-t-elle vraiment la capitale d’Israël?

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