Alors que l’Europe s’apprête à réduire l’influence de Moscou sur ses approvisionnements énergétiques, ce n’est pas le moment pour Israël d’arrêter l’exploration gazière.
La crise ukrainienne de 2022 a illustré à quel point la diversification des sources de gaz européen était devenue importante et l’urgence de trouver des alternatives au gaz russe, ne serait-ce que pour réduire l’emprise de Moscou sur l’Europe et l’OTAN. Le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, a pu exprimer une politique unie pour l’Europe, déjà en janvier 2022, avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, sur la base de son point de vue selon lequel « nous devons réduire notre dépendance à l’énergie russe ».
Fin 2021, environ 40 % des importations de gaz naturel de l’UE provenaient de Russie. Les Russes ont travaillé systématiquement pour créer cette situation, se servant du Gaz comme arme d’influence. Ils ont même proposé au précédent chancelier allemand, Gerhard Schröder, un poste dans leur compagnie nationale d’énergie, Gazprom. Début mars, le président Joe Biden a annoncé une interdiction des importations de pétrole et de gaz russes aux États-Unis. L’UE a annoncé, en réponse, qu’elle prévoyait de réduire ses importations de gaz naturel russe des deux tiers d’ici la fin de 2022.
Alors que Washington recherchait des sources alternatives de produits énergétiques en provenance d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, ils ont refusé d’aider à ce stade compte tenu de la politique de l’administration Biden, opposée à la guerre au Yémen. Actuellement, les autres fournisseurs de l’Europe par gazoduc sont la Norvège (22%), l’Algérie (18%) et l’Azerbaïdjan (9%), mais ils ne peuvent pas se substituer au gaz russe.
Le point de vue israélien compte aussi dans les stratégies consistant à trouver une solution à la question du gaz russe pour l’Europe. La Russie se classe au premier rang mondial pour le volume de son gaz naturel avec 35 000 milliards de mètres cubes. Il est suivi par l’Iran et le Qatar. La Méditerranée orientale, dans son ensemble, y compris Israël, possède d’immenses réserves de gaz estimées à 10,8 billions (soit 10 800 milliards) de mètres cubes de gaz, soit environ 5 % des réserves mondiales de gaz. Cette quantité de gaz a été estimée comme à peu près équivalente à 76 années de consommation de gaz par l’UE.
Si nous nous concentrons uniquement sur la partie israélienne des réserves de la Méditerranée orientale, elle s’élève à elle seule à 1 000 milliards de mètres cubes, qui pourraient atteindre 3 000 milliards de mètres cubes à l’avenir, si toutes les eaux économiques d’Israël sont explorées et exploitées.
Le nouveau gouvernement israélien dirigé par le Premier ministre Bennett a malheureusement modifié la politique énergétique israélienne ; la ministre israélienne de l’Énergie, Karine Elharrar, semble adopter certaines des préférences de l’industrie américaine des énergies renouvelables. En effet, elle a suspendu pendant un an l’octroi de permis d’exploration de gaz naturel alors que son ministère consacrait ses efforts à travailler sur les énergies renouvelables.
Malgré le report du projet de gazoduc d’Israël vers l’Europe par l’administration Biden, pour des raisons qui ne sont pas tout à fait claires, le gaz israélien est toujours utilisé pour ses partenaires du Moyen-Orient, en particulier l’Égypte et la Jordanie. Depuis une dizaine d’années, l’Iran cherche à exporter son gaz vers l’Irak et même la Jordanie, étendant ainsi son influence à l’est d’Israël.
Avec l’amélioration envisagée des liens entre Israël et la Turquie, Ankara pourrait devenir à l’avenir une plaque tournante des exportations de gaz israélien. Ainsi, au lendemain de la guerre en Ukraine, il existe de multiples raisons pour lesquelles on doit absolument reprendre les travaux sur l’oléoduc East Med au plus vite ainsi que l’exploration gazière en Méditerranée orientale. De plus, l’augmentation de l’approvisionnement en gaz de l’Occident contribuera également à faire baisser son prix, compromettant ainsi la capacité de la Russie à financer sa machine de guerre à l’avenir.
La guerre en Europe devrait accélérer ces changements et faire entrer Israël dans de nouveaux systèmes d’alliance. Il existe déjà une nouvelle coalition avec la participation de l’Inde, des Émirats arabes unis et des États-Unis qui comprend Israël et est connue sous le nom de « Quad ». On ne peut exclure la possibilité que la Turquie, avec les États européens, rejoigne cette nouvelle structure et la question de l’énergie peut fournir un dénominateur commun à ses membres. Ainsi, le gaz israélien est un facteur stratégique important et ne doit pas être écarté ou négligé.
© Marc Brzustowski pour Israël 24/7
Traduit et adapté depuis : Israel HaYom