Assad voulait relancer un programme d’armes chimiques. Israël a dit non, deux fois, avec deux bombardements

Bashar el Assad et sa femme, lors d'un dîner au Petit Palais à Paris en 2008

Lundi, le Washington Post a révélé que deux frappes aériennes attribuées à Israël en 2020 et 2021 avaient visé des sites sur lesquels la Syrie développait des armes chimiques.

Ces frappes ont tué sept Syriens, dont un général de brigade (grade obtenu à titre posthume) nommé Ayham Ismail, qui était un haut responsable de l’usine CERS, qui développait les armes chimiques du pays.

Les frappes sur les installations secrètes où le régime syrien avait l’intention de relancer son programme de fabrication d’armes chimiques avaient trois objectifs.

  1. Le premier, le plus évident, était d’empêcher les armes non conventionnelles de tomber entre les mains de la Syrie, même si elles n’en étaient qu’aux premiers stades de développement et qu’elles étaient principalement destinées aux opposants au régime.
  2. Le deuxième était de faire comprendre au président syrien Bachar el Assad qu’Israël ne permettrait pas à la Syrie de recommencer à la menacer avec des armes de destruction massive.
  3. Troisièmement, et il en est ainsi pour toute action de géopolitique, les bombardements ont envoyé un message aux autres pays – principalement l’Iran – qui seraient tentés de menacer Israël, pour leur faire comprendre qu’Israël adoptera la même ligne de conduite à l’encontre de quiconque développe des armes qui menacent l’existence de son peuple.

La Syrie disposait d’un énorme arsenal d’armes chimiques, principalement des agents neurotoxiques mortels. Assad les a utilisés contre son opposition dans des dizaines de cas, mais a été contraint de changer de cap après la mort de plus de 1 400 citoyens dans une attaque à Damas en août 2013. Après que les États-Unis ont menacé d’attaquer la Syrie en réponse à cette attaque, Assad a accepté de renoncer à son arsenal, les Américains et les Russes ont conclu un accord, et plus de 1 300 tonnes d’armes chimiques ont été retirées de Syrie et détruites. Mais bien entendu, Assad a continué à utiliser d’autres types d’armes chimiques contre ses opposants, principalement du gaz de chlore, car Assad est un dictateur criminel sanguinaire. Et si la Syrie avait quelqu’un de moins dangereux que lui à mettre à sa tête, il y a longtemps qu’il aurait été poussé vers la sortie. Ainsi marche le Proche-Orient dont le seul Etat stable est Israël, ce qui dérange les gauchistes du monde.

Et ni les Etats-Unis ni la Russie n’ont réagi lorsqu’Assad a reconstitué son stock d’armes nucléaires. On se souvent que Barack Obama s’était ridiculisé après avoir menacé Assad, en août 2012, de sa terrible riposte si la « ligne rouge » de l’emploi de l’arme chimique était dépassée, qu’Assad avait largement dépassé la ligne rouge et gazé et tué plus 1400 opposants, dont des enfants, et qu’Obama n’avait rien fait.

Israël a prévenu le monde, parce qu’Israël, comme pour le nucléaire iranien, n’est pas dans la même situation que le reste du monde : Israël est le seul pays menacé de destruction par l’Iran et ses pions syriens et Hezbollah.

Israël a compris et expliqué que le fait que le monde laisse faire Assad conduirait à terme la Syrie à reprendre la production d’armes chimiques plus sophistiquées, ce qui s’est produit.

Et là, Israël, et il doit remercier Obama pour cela, a pris la décision de ne pas attendre que la Syrie se dote de stocks importants d’armes chimiques, ou que les Etats-Unis réagissent, mais de les éliminer dès les premiers stades.

Les observateurs politiques occidentaux peuvent s’offrir le luxe de se laisser séduire par le visage amical qu’Assad tente de montrer au monde, et par sa relative tolérance des chrétiens de Syrie. Israël n’a pas le droit à cette naïveté, et le fait que la Syrie ait poursuivi ses efforts pour développer des armes chimiques montre qu’Assad continue à poursuivre des méthodes de destruction massive.

Le rapport du Washington Post n’indique pas quelle a été la réponse des États-Unis aux frappes israéliennes. Le fait que la réponse n’ait pas fait l’objet de fuites ou de communiqué suppose un accord tacite, à condition qu’il reste discret. Il ne dit pas non plus pourquoi ce ne sont pas les États-Unis qui ont attaqué, mais on devine la raison : la Syrie, c’est loin, la Russie est très impliquée, et le département d’Etat américain a toujours été traditionnellement hostile à Israël. Notons cependant que seule l’administration Trump a réagi et exercé la force militaire en frappant la Syrie – mais légèrement – suite à son emploi d’armes chimiques contre son peuple.

En évitant d’attaquer, Obama avait rendu un immense service à Israël, le même service que l’administration Biden lui rend en ce moment en adoptant un ton et des mesures de plus en plus hostiles : l’Amérique envoie un message clair : la protection contre les acteurs néfastes du Moyen-Orient, c’est l’affaire d’Israël, qui en dernier ressort ne doit pas trop s’appuyer sur les Etats-Unis, qui ne lâcheront cependant jamais Israël, même si la gauche en rêve : l’idée qu’Israël signe une alliance explicite avec la Russie après avoir été abandonné par les Etats-Unis serait un affront insurmontable.

Israël a défendu ses principes parce que la menace est létale, pas parce qu’elle défend ses principes : sa mollesse vis-à-vis de la lente capture de fait de la Judée Samarie par les Arabes devrait suffire à convaincre.

« Le moment choisit pour la publication du rapport par le Washington Post », affirme un analyste dans le domaine de la Défense que je ne citerais pas car il se trompe, « indique que quelqu’un avait intérêt à ce que l’objectif des frappes contre la Syrie soit exposé maintenant, alors que les négociations nucléaires avec l’Iran sont en cours, pour s’assurer qu’elles aient un écho au-delà de la Syrie, notamment à Beyrouth et à Téhéran ».

L’analyste se trompe oui, car la Syrie et l’Iran, donc le Hezbollah qui représente la menace la plus rapide à déclencher contre Israël, savent très bien ce qu’Israël bombardait, en 2020 et 2021. Ce sont les puissances occidentales et les éléments les plus nocifs de la faible administration Biden, qui pourraient avoir besoin de ce rappel. Encore que l’immense incompétence destructrice dont fait preuve cette administration – il suffit de garder à l’esprit la débâcle du mode choisi pour le retrait d’Afghanistan – me fait penser au proverbe : on ne peut pas transformer un canasson en cheval de course.

La sagesse juive recommande de ne jamais surestimer son ennemi, je suppose que cela s’applique aussi pour ses amis.

© Jean-Patrick Grumberg pour Israël 24 7.org

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