Traduction de Magali Marc de l’article publié par les journalistes de Honest Reporting, le 6 mars.
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Conflit en Ukraine : comment les médias déforment les politiques et les actions d’Israël
Alors que les troupes russes continuent de bombarder des villes clés en Ukraine, une délégation israélienne dirigée par le Premier ministre Naftali Bennett s’est rendue le 5 mars à Moscou pour tenter de servir de médiateur dans ce conflit qui a déjà coûté la vie à au moins 351 civils depuis le 24 février.
Après une conversation de trois heures avec le président Vladimir Poutine, qui aurait porté sur « la guerre en Ukraine, y compris la situation des Israéliens et des communautés juives à la suite du conflit », M. Bennett a informé le président ukrainien Volodymyr Zelensky, ainsi que les dirigeants européens, de l’évolution de la situation.
M. Bennett est devenu le premier dirigeant mondial à être reçu au Kremlin depuis le début de l’action militaire de la Russie en Ukraine. La réunion de samedi – coordonnée à l’avance avec les États-Unis et d’autres acteurs – est conforme à ce que le premier ministre israélien a décrit à de multiples occasions comme étant une approche « mesurée et responsable » de la résolution de la crise.
Israël entretient de bonnes relations avec la Russie et l’Ukraine. En effet, Kiev a demandé à plusieurs reprises que l’État juif serve d’intermédiaire. Selon le radiodiffuseur public israélien, M. Zelensky, lors d’une conversation téléphonique avec M. Bennett, a exprimé sa préférence pour que les négociations aient lieu à Jérusalem.
« Nous continuerons à aider tant qu’on nous le demandera », a déclaré M. Bennett à son retour en Israël. « Même si les chances ne sont pas grandes, alors qu’il n’aurait ne serait-ce qu’une petite ouverture, et que nous avons accès à toutes les parties, je considère que c’est notre responsabilité morale de tout essayer tant que c’est possible. »
Pourtant, alors qu’Israël intensifie ses efforts pour contribuer à mettre fin à l’effusion de sang et aider la population civile ukrainienne par le biais de l’aide humanitaire, les principaux médias continuent de désinformer le public concernant l’approche de Jérusalem.
Voici trois questions sur lesquelles les médias ont mal informé leurs lecteurs :
1. La politique russe d’Israël : agir avec prudence
L’«équilibre délicat» que maintient Israël vis-à-vis de la Russie a été interprété par plusieurs publications comme étant un refus de critiquer les actions de Moscou.
- Par exemple, le 5 mars, le Los Angeles Times a publié un article qui comprenait la phrase suivante : « Comme la Chine, Israël répugne à critiquer la Russie ».
- Le 2 mars, l’agence Associated Press affirmait également qu’Israël « a été discret dans ses critiques envers la Russie ».
Aucun de ces articles n’a pris la peine de citer les déclarations israéliennes concernant l’appui de l’État Juif envers l’Ukraine.
- Le 23 février, un jour avant le début de la campagne militaire de grande envergure de la Russie, le Ministère israélien des Affaires étrangères a publié une déclaration de reconnaissance de « l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine ». La déclaration disait qu’Israël « espère une solution diplomatique qui conduira au calme, et est prêt à aider si on le lui demande. »
- Le lendemain, le ministre des Affaires étrangères, Yair Lapid, a qualifié sur Twitter l’attaque russe contre l’Ukraine de « violation grave de l’ordre international » et a proposé une aide humanitaire aux citoyens du pays.
Suite à cette déclaration de M. Lapid, l’ambassadeur d’Israël à Moscou, Alexander Ben Zvi, a été convoqué au ministère russe des Affaires étrangères. - La semaine dernière, le Premier ministre Bennett a commencé la réunion hebdomadaire du cabinet en déclarant que les Israéliens « prient pour le bien-être des citoyens de l’Ukraine et espèrent que de nouvelles effusions de sang seront évitées. »
- Le 2 mars, lors d’une conférence de presse en compagnie du Chancelier allemand Olaf Scholz, le Premier ministre a demandé un « cessez-le-feu immédiat en Ukraine », tout en soulignant que l’État juif « s’identifie aux citoyens qui sont soumis à un danger et un stress considérables à Kiev, à Kharkiv, dans le sud et dans d’autres endroits. »
2. Les réalités géopolitiques
Israël s’est clairement prononcé en faveur du peuple ukrainien, mais Jérusalem doit aussi naviguer dans les eaux tumultueuses d’une réalité géopolitique complexe. La Russie est le principal acteur en Syrie, où l’armée israélienne doit conserver une liberté d’action afin de contrecarrer le terrorisme iranien.À cette fin, Israël et la Russie utilisent un mécanisme de coordination qui permet d’éviter tout conflit indésirable entre les deux. Dans le cadre de la campagne dite « d’entre-deux-guerres » menée par Jérusalem, des centaines de frappes aériennes ont été effectuées contre des cibles iraniennes dans le pays, y compris des convois d’armement de pointe à destination du Hezbollah au Liban, assurant ainsi la sécurité des citoyens israéliens.
La nécessité pour Israël de maintenir ouvertes les lignes de communication avec la Russie est d’autant plus pressante que Washington a annoncé son intention de poursuivre le dialogue avec Moscou en vue d’un retour à l’Accord de 2015 sur le nucléaire iranien, qui, selon les experts, ne contiendra pas de restrictions concernant l’appui apporté par la République islamique à ses mandataires terroristes au Moyen-Orient.
Cette complexité semble pourtant échapper à certains journalistes.
La semaine dernière, la présentatrice de CNN Christiane Amanpour, a reproché à Israël de ne pas avoir signé la résolution parrainée par les États-Unis au Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU) qui déplore « dans les termes les plus forts » l’«agression» de la Russie contre l’Ukraine comme violant l’article 2(4) de la Charte des Nations unies.
« […] Israël est également un allié des États-Unis et n’a pas appuyé la résolution parrainée par eux au Conseil de sécurité », a déclaré Mme Amanpour à l’antenne. « Après toutes les fois où les États-Unis se sont mis en quatre pour soutenir Israël – tout le temps – à l’ONU et dans tous les forums mondiaux… Je veux dire, pouvez-vous même comprendre pourquoi Israël n’est pas allé […] lire à Poutine l’acte d’émeute ? ».
Elle a ajouté :
« Je dois dire que je suis vraiment stupéfaite, comme vous, que cela n’ait pas vraiment, vous savez, affecté Israël, au sens moral. »
Apparemment, les besoins d’Israël en matière de sécurité sont insignifiants pour Mme Amanpour.
En outre, l’animatrice de CNN a omis de mentionner qu’Israël n’est pas membre du Conseil de sécurité des Nations unies, qui ne compte que 15 membres. Pour mémoire : lorsqu’une résolution similaire a été soumise à l’Assemblée générale des Nations unies, Israël s’est rangé du côté des 141 pays qui ont condamné la Russie – et a même aidé les États-Unis à rallier des voix en sa faveur.
3. L’aide humanitaire considérable d’Israël
De nombreux médias ont critiqué Israël pour son refus de fournir une aide militaire à l’Ukraine. Prenez, par exemple, cet article publié le 3 mars par Foreign Policy :
« Israël a envoyé de l’aide humanitaire dans la région mais s’est abstenu de toute assistance militaire, allant même, selon des rapports non confirmés, jusqu’à faire échouer une offre américaine de transfert de batteries de missiles défensifs Iron Dome à l’Ukraine. »
Plusieurs experts dans les médias ont exprimé des sentiments similaires.
L’ambassadeur d’Ukraine en Israël, Yevgen Korniychuk, a admis que :
« La Russie utilise des armes complètement différentes de celles des Palestiniens, donc le système Iron Dome ne nous aiderait probablement pas. »
Pendant ce temps, l’ampleur de l’opération humanitaire d’Israël – l’une des plus importantes de l’histoire du petit pays qu’est Israël – n’est pratiquement pas rapportée dans les médias.
La semaine dernière, des avions israéliens ont livré au moins 100 tonnes d’aide au pays déchiré par la guerre, notamment des fournitures médicales. La cargaison contenait également des systèmes de purification de l’eau, 15 000 couvertures, sacs de couchage et tentes pour 3 000 personnes, ainsi que 2 700 manteaux d’hiver.
Dans le cadre de ses efforts continus pour venir en aide aux victimes de la guerre, le Ministère israélien de la santé a annoncé le 6 mars qu’il allait mettre en place un hôpital de campagne en Ukraine. L’hôpital comprendra des salles pour enfants et adultes, une salle d’urgence, une salle d’accouchement et une clinique de soins primaires. En outre, l’État juif transférera « six énormes générateurs » à l’hôpital de Lviv, ce qui permettra « un fonctionnement continu [de l’hôpital] même sans alimentation électrique. »
Dans le même temps, le Ministère israélien de l’Alya et de l’intégration s’est préparé ces dernières semaines à l’absorption de milliers d’immigrants en provenance d’Ukraine. Les immigrants qui viennent d’Ukraine recevront une importante subvention unique promise aux personnes arrivant des zones de combat. En outre, ces nouveaux citoyens israéliens pourront bénéficier de mesures financières et d’un logement temporaire.
Ces derniers jours, Israël a accueilli plusieurs avions amenant des réfugiés ukrainiens dans le pays, dont 100 orphelins.
Pendant tout ce temps, l’État juif a aidé à sauver des milliers de personnes de la zone de guerre – y compris des citoyens d’États hostiles à Israël comme le Liban – un fait qui a également été absent de la couverture médiatique.
Comme l’a souligné Honest Reporting dans une critique du 1er mars, les comparaisons entre l’attaque russe contre l’Ukraine et le conflit israélo-arabe, telles qu’elles ont été publiées tout récemment dans The Nation, n’ont aucun fondement dans la réalité. Cependant, il y a un problème qui touche les deux conflits : la désinformation.
À ce propos, nous vous invitons à lire cet article complet (publié le 5 mars) du Wall Street Journal sur la manière de distinguer la réalité de la fiction.
© Traduction et adaptation, Magali Marc pour Israël 24/7.org
Source: https://honestreporting.com/ukraine-conflict-how-media-are-misrepresenting-israels-policies-and-actions/
Merci beaucoup pour cet état des lieux. Numéro d’equilibriste pour Israël qui lui permet de jouer un rôle de premier plan et de conserver le respect des belligerants. Finalement, des déclarations unilatérales et déterminées de va-t-en guerre n’apportent rien.