Dans un premier temps, le Premier ministre a déclaré qu’il allait demander une législation pour interdire une enquête faite par l’armée sur l’armée, parce qu’il veut une enquête indépendante en laquelle les Israéliens auront confiance, suivant le vieil adage qu’on ne peut pas être juge et partie.
Netanyahou a fait des déclarations en ce sens, et moins de 24 heures plus tard, les hauts responsables de l’armée, qui appartiennent à la gauche avide de maintenir son contre-pouvoir non légitimé par le processus démocratique, a décidé de tenir tête au gouvernement, et de déclencher sa propre enquête.
Voici un extrait du communiqué de Tsahal 1:
L’armée israélienne et le contrôleur d’État sont parvenus aujourd’hui (jeudi) à des accords conjoints concernant le lancement d’un audit par le contrôleur d’État de Tsahal. Le plan qui a été élaboré permet une révision importante, en maintenant l’attention de Tsahal et de ses commandants sur la guerre et les processus d’apprentissage au sein de Tsahal.
Dans les prochains jours, après la réduction de l’ordonnance de la Haute Cour de justice, les travaux d’audit de Tsahal sur diverses questions commenceront progressivement. L’existence des principales révisions de l’échec du 7 octobre sera examinée au premier trimestre 2025, en tenant compte de la situation de guerre.
Sachant que des responsables de la débandade du 7 octobre au sein de l’armée ont été promus à des postes identiques ou supérieurs ; sachant que plusieurs fois, l’armée a tenté de pousser Netanyahou à abandonner son objectif d’écraser le Hamas (souvenez-vous, le porte-parole avait déclaré que le Hamas est une idée, et qu’une idée ne peut pas être détruite. Puis il avait osé déclarer que quiconque – il visait Netanyahou qui venait d’en faire la promesse aux Israéliens – croit que le Hamas peut être éliminé vit dans le rêve) ; et sachant que les premiers témoignages qui nous étaient parvenus, dans les semaines qui ont suivi le 7 octobre, nous apprenaient que les hauts-gradés refusaient les comptes rendus des observatrices sur le terrain, en les menaçant même de les sanctionner, si elles s’obstinaient à témoigner des choses anormales et suspectes qu’elles observaient à la frontière côté Gaza, et ce parce qu’ils avaient décidé que Sinwar avait tourné le dos au terrorisme, qu’il voulait reconstruire l’économie de Gaza, et que les observatrices contredisaient la pensée dominante adoptée au sommet de la hiérarchie de l’armée – sachant tout cela, il n’est pas certain que l’enquête de Tsahal emporte la confiance de la majorité des Israéliens. Elle remportera peut-être la confiance de la minorité de gauche. Pas de la majorité du pays.
Je le sais, mes propos sont difficiles à lire parce qu’ils n’apportent pas un soutien monolithique à l’armée. Mais je vous rappelle que je pratique le journaliste à l’ancienne, et non le journalisme de vos médias, qui sont là pour vous influencer. Mon rôle n’est pas de passer la brosse à reluire et offrir des bouquets de roses, ni à calomnier et enfoncer des dagues, mais à rapporter les faits honnêtement, en les analysant à la lumière de la réalité, pas de l’idéologie.
Ceux qui ne parviennent pas à se sortir du manichéisme à la mode n’aimeront pas ce que j’écris, et je m’en excuse, mais je ne peux pas renoncer à mon honnête observation.
Conclusion
Les dirigeants de l’armée sont à la fois : d’extraordinaires stratèges militaires, de formidables meneurs d’hommes, d’exceptionnels accomplisseurs de prouesses militaires sur le terrain, meilleurs que les meilleures armées au monde. C’est ce qu’ils sont et nous en voyons les preuves tous les jours. Et ils sont par ailleurs de piètres analystes politiques, ils manquent bien souvent de l’indispensable humilité qui permet de se remettre en question et de voir ses erreurs de jugement ; ils sont de mauvais juges des vices et de la takiya des Arabes d’en face, et de mauvais politiciens.
Et Netanyahou a lui-même affirmé – publiquement – qu’ils sont faibles et mauvais négociateurs lorsqu’ils s’agit de la libération des otages, et qu’ils se trompent de côté en faisant pression sur le gouvernement israélien, et non sur le Hamas, lors de ces négociations.
© Jean-Patrick Grumberg pour Israël 24 7.org